L'origine de l'intelligence
Les avancées dans le domaine des neuro-sciences permettent aux scientifiques
d'être chaque jour plus proches d'obtenir une réponse définitive
Tout au long de l'histoire de l'humanité un nombre infini de chercheurs ont cherché à répondre à cette question sans grand succès. Ils n’ont pas trouvé non plus une réponse satisfaisante à ce qu’une personne soit plus intelligente qu’une autre. Certains scientifiques pensaient que la taille de certaines zones du cerveau – y compris celui du cerveau – était la solution de l'équation ; d'autres, cependant, croient que la clé résidait dans le nombre de neurones.
Qu’est-ce que l’intelligence ? D’où
vient-elle ? Quelle est son origine au sens historique mais aussi au sens
physiologique ? Est-ce une zone particulière du cerveau ? Est-ce
certaines connexions particulières ?
L'intelligence – selon la définition du
dictionnaire – est l'ensemble des facultés mentales permettant de comprendre
les choses et les faits, de découvrir les relations entre elles et d'aboutir à
la connaissance conceptuelle et rationnelle (par opposition à la sensation et à
l'intuition). Elle permet de comprendre et de s'adapter à des situations
nouvelles et peut en ce sens être également définie comme la faculté d'adaptation.
L'intelligence peut être également perçue comme la capacité à traiter
l'information pour atteindre ses objectifs.
L’intelligence humaine, celle qui le distingue des
animaux, consiste à créer du lien entre des événements qui n’en avaient pas de
façon évidente. C’est cette capacité à donner du sens qui est spécifique à
l’homme parmi toutes les fonctions intelligentes :
* L’attention ou distinction est une faculté de
faire attention et distinguer des choses ou actes existants dans
l’environnement.
* La concentration est une faculté permettant
d’évaluer les distances, de se représenter des volumes et mouvements par représentation
mentale.
* La conscience ou compréhension est une faculté
de comprendre les problèmes et les actes généralement.
* Le raisonnement ou pensée est la faculté de
planifier. Elle est aussi appelée créativité.
* L’humour est une preuve que l’on s’adapte
facilement socialement.
La seule fonction cérébrale qui semble pouvoir
être considérée comme à l’origine de cette fonction "intelligence"
n’est ni la mémorisation, ni le langage, ni l’écriture, ni d’autres fonctions
mais plutôt l’automatisme dit d’interprétation que l’on trouve dans une zone
cingulaire du cortex cérébral.
Notre cerveau a développé une capacité
d’interprétation intuitive d’une part et une capacité de confrontation logique
d’autre part. Le combat entre intuition et raisonnement correspond
partiellement à une opposition entre les deux hémisphères cérébraux. Le
dialogue du cerveau provient du fait que les deux hémisphères ne donnent pas
des réponses du même type, si on leur envoie la même information. La richesse
de la pensée humaine, sa complexité, pourrait bien avoir cette origine.
Le rôle du cortex cingulaire antérieur
Le cortex cingulaire
est une partie du cerveau située sur la partie médiale du cortex, au-dessus et
le long du corps calleux depuis le lobe frontal médial jusqu’au sillon
cingulaire, en arrière.
Il existe une région
particulière du cerveau humain dans laquelle les systèmes neuraux sous-tendant
l’expression et la perception des émotions, ainsi que ceux relatifs à la
mémoire de travail et à l’attention, interagissent de façon si étroite qu’ils
constituent la source mobilisatrice aussi bien des activités externes (les
mouvements du corps) que des activités internes (vie mentale, raisonnement).
Cette région est le cortex cingulaire antérieur, une pièce de ce puzzle que
constitue le système limbique.
Trois régions du cerveau impliquées dans
l’intelligence
Plusieurs régions clés ont été répertoriées. Les
plus importantes se retrouvent au niveau du cortex préfrontal gauche, du cortex
temporal – très largement utilisé pour l'intelligence générale – et à l’arrière
du cerveau, au niveau du cortex pariétal. Certaines zones de l’intelligence
générale et des fonctions exécutives se chevauchent. Ces structures sont
également interconnectées.
Les facultés intellectuelles et cognitives ne
correspondent pas à une région précise du cerveau, ni à l’intégralité de
l’encéphale, mais elles dépendent de quelques aires spécifiques.
Les régions
particulières et les connexions indiquent que l’intelligence dépend de la
capacité du cerveau à intégrer l’information depuis des processus verbaux,
visuels, spatiaux et exécutifs.
Intelligence : la part des gènes
Les études génétiques de l'intelligence se placent
maintenant dans une perspective cognitiviste, qui décompose l'intelligence en
aptitudes assorties d'un ancrage neurobiologique et cérébral : à chaque
fonction psychologique – les variantes de la mémoire, l'apprentissage, la
plasticité – correspond un réseau de structures cérébrales.
L'intelligence mesurée par les tests de QI ne se
prête pas à des études génétiques. Cet instrument nous renseigne sur le degré
d'adaptation sociale et intellectuelle d'un individu, sans tenir compte de
fondements biologiques sous-jacents, qui permettraient de relier les capacités
mesurées aux gènes.
Des gènes interviennent dans le fonctionnement du
cerveau et, par contrecoup, sur nos comportements. Mais l'existence d'une
relation entre gènes et comportements n'implique pas pour autant que
l'intelligence soit héréditaire.
Les gènes n'agissent pas de façon linéaire :
ils induisent, en interaction les uns avec les autres, des cascades de
réactions extrêmement complexes impliquant une multitude d'acteurs différents. Chaque
gène est polyvalent et il est impossible de dresser une carte du génome où l'on
ferait correspondre tel gène à telle fonction.
L'opposition inné/acquis, c'est un débat dépassé
On a tendance à dire que ce qui apparaît à la
naissance, c'est l'effet des gènes. C'est faux : pendant les neuf mois de
grossesse, il se passe beaucoup de choses. La mère sert en quelque sorte de
filtre aux événements extérieurs, sociaux mais aussi chimiques – ce qu'elle
mange, respire, fume, boit, ingère ou s'injecte comme drogue –, elle peut aussi être stressée, anxieuse, fatiguée.
Tout cela n'est pas sans conséquence sur le fœtus.
Il y a en réalité, dès les premières millisecondes de la fécondation, un effet
de l'environnement. Cette interaction précoce des facteurs génétiques et
d'environnement indique que l'inné est en grande partie acquis et qu'on ne peut
pas conclure que ce qui arrive à la naissance est prédéterminé par les gènes.
Quant à l'acquis, c'est par définition tout ce qui s'apprend. Or, là aussi,
l'acquis peut être antérieur à la naissance. On sait que le fœtus est déjà doté
de capacités d'apprentissage, qu'il est capable de reconnaître par exemple, la
voix de ses parents.
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Le cerveau humain n’a jamais été autant étudié par
les chercheurs. Et il ne s’agit pas que de biologistes et de neurologues. Des
scientifiques issus de toutes les disciplines travaillent sur le sujet. Les
psychiatres, par exemple, s’intéressent toujours plus aux liens entre maladies
mentales et troubles du cerveau. Les ingénieurs en informatique et en robotique
tentent pour leur part de s’inspirer de notre architecture neuronale pour créer
des outils technologiques.
Projet
du Connectome Humain
Le Projet du Connectome Humain, mené par
le National Institute of Health aux Etats-Unis, comparable en importance au
projet du génome humain, a été lancé en juillet 2009.
Il a pour but de cartographier en détail toutes
les connexions à l'intérieur du cerveau. La tâche est colossale, mais les retombées
extrêmement prometteuses : comprendre ce que nous sommes, comment
fonctionne notre cerveau et pourquoi, parfois, il déraille.
Un grand nombre de
chercheurs en neurosciences, qu’ils soient biologistes, chimistes,
informaticiens, mathématiciens ou médecins, travaillent là-dessus.
D'une durée de cinq ans et rassemblant dix centres
de recherche aux Etats-Unis et en Europe, il a pour objectif de collecter une
vaste quantité de données en recourant à des systèmes d'imagerie avancés
portant au total sur 1.200 adultes sains et d'y donner librement accès aux
chercheurs dans le monde.
L’imagerie par résonance magnétique (IRM) de
diffusion. À la base, cette technique permet de retracer le câblage des fibres
nerveuses de la matière blanche du cerveau qui relient les neurones, un peu à
la manière d’un réseau routier. Pour
le moment, l’IRM ne peut prendre de mesure en dessous du millimètre. Or il faut
atteindre un niveau microscopique pour cartographier le connectome.
Les jaune et rouge représentent les régions où une plus grande activité a été développée chez les participants pour une ou plusieurs tâches. Le bleu représente les régions moins actives. |
David Van Essen, professeur à la faculté de
médecine de l'Université Washington à St Louis (Missouri), un des principaux
responsables de ce consortium, explique qu’en rendant disponibles immédiatement
ces données uniques et en continuant à en publier régulièrement de nouvelles
tous les trimestres, l'Human Connectome
Project permet à la communauté scientifique de commencer sans attendre à
explorer les liens entre les circuits du cerveau et les comportements
individuels.
Selon lui, cette étude aura un impact majeur sur
notre compréhension du fonctionnement du cerveau des adultes en bonne santé et
établira la base pour de futurs projets d'étude qui examineront les changements
dans les circuits cérébraux qui sont à l'origine d'une grande variété de
maladies mentales.
Le Human Brain Project
Le Human Brain Project (HBP) a été lancé en
octobre 2013. Devisé à 1,2 milliard d'euros, la Commission européenne contribue
à son financement, estimé à 1.19 milliards d'euros.
Coordonné par une équipe de l'École polytechnique
fédérale de Lausanne (EPFL), le Projet du Cerveau Humain fédère plus de 80
institutions de recherche européennes et internationales pour trouver des
traitements contre les maladies du cerveau, via la reconstitution sur
ordinateur du cerveau humain.
Il vise à modéliser la structure et le
fonctionnement du cerveau humain grâce à l'informatique. 135 partenaires – neuroscientifiques,
médecins, informaticiens, roboticiens – participent au projet.
Elles portent sur la neuro-informatique, la
simulation du cerveau, le calcul à haute-performance, l'informatique médicale,
l'informatique neuro-morphique et la neuro-robotique.
Dès 2016, les plates-formes seront à disposition
des équipes scientifiques du monde entier.
A l’origine du Human Brain Project, on trouve un
autre travail, le Blue Brain Project. Il s’agissait de simuler une colonne de
neurones du cerveau du rat.
Projet
de création d’une cartographie
de l’activité cérébrale
de l’activité cérébrale
Un effort concerté de grande envergure pour faire progresser la connaissance de l'homme sur les neurones, la perception, l'action et la conscience |
Brain Research through Advancing
Innovative Neurotechnologies (BRAIN)
vise à aider les chercheurs à comprendre les troubles neurologiques,
comme
la maladie d'Alzheimer, la maladie de Parkinson,
la dépression et les lésions
cérébrales traumatiques.
Le 2 avril 2013, le président Obama a présenté le Brain Activity Map Project. Ce programme, qui pourrait s’étaler sur 10 ans, a pour but de comprendre le fonctionnement du cerveau humain et ainsi de trouver de nouveaux traitements curatifs ou préventifs pour des troubles du cerveau tels que la maladie d’Alzheimer, de Parkinson ou l’épilepsie.
Le Brain Activity Map Project – aussi
appelé BRAIN Initiative : Brain Research through Advancing Innovative Neurotechnologies – est un projet de recherche public-privé ayant
pour objectif d'accélérer le développement et les applications de technologies
innovatrices pour améliorer la compréhension du cerveau humain. Le projet est
basé sur le même principe que le Projet génome humain. Ce programme va durer
une dizaine d’années.
L’initiative BRAIN dépasse largement le cadre des
neurosciences. Pour comprendre l’ensemble des fonctionnalités du cerveau, il
faudra développer de nouveaux outils, de nouvelles technologies qui pourront
s’avérer utiles même dans des domaines qui n’auront rien à voir avec le
cerveau. Par exemple, le développement de nouveaux capteurs susceptibles de saisir
l’activité des neurones. Aujourd’hui, lorsqu’on désire connaître le
comportement d’un neurone individuel, il faut utiliser des microélectrodes, ce
qui implique une opération chirurgicale et l’ouverture de la calotte crânienne.
Une telle complexité est bien sûr incompatible avec les buts de la BRAIN
initiative.
Il faudra développer des nano-systèmes capables de
tracer le comportement neuronal de façon moins invasive. La nanotechnologie
sera véritablement au cœur de BRAIN. Par exemple, le neuroscientifique Rafael
Yuste de l’université de Columbia, espère utiliser des “nano-diamants”
susceptibles de changer de couleur quand une impulsion électrique est envoyée
par un neurone. Ces nano-diamants pourraient
être attachés à un unique neurone, ou dispersés partout dans le cerveau.
Ce programme de recherche s'articule autour de trois grands axes :
* Créer la prochaine génération de techniques
d'imagerie,
* Développer des méthodes d'enregistrement à
grande échelle de l'activité cérébrale,
* Élaborer
des modèles informatiques permettant de comprendre les fonctions de circuits
neuronaux spécifiques.
Le cerveau humain est composé de 100 milliards de
neurones qui interagissent entre eux à travers 100.000 milliards de
connections. Il reste ainsi l’une des “terra
incognita’ de la science et l’un des plus grands challenges de la médecine.
Les principales étapes programmées sont les suivantes::
Une molécule fluorescente dans les neurones de souris brille lorsque les cellules cérébrales sont activées |
* Créer des cartes structurelles du cerveau.
* Développer un réseau à grande échelle enregistrant
les capacités cérébrales.
* Développer des outils pour la manipulation des circuits neuronaux.
* Lier l'activité neuronale aux comportements.
* Intégrer les théories, modélisations,
statistiques avec les résultats des expérimentations.
* Mieux préciser les processus sous-jacents aux techniques
d'imagerie cérébrale.
* Créer des mécanismes facilitant les observations
chez l'homme.
* Diffuser les connaissances et les modalités
d'apprentissage.
L’initiative BRAIN permettra de visualiser
directement les activités du cerveau impliquées dans des fonctions vitales
comme la vision, l’audition et la mémoire. Une étape cruciale pour la
compréhension des maladies cérébrales et la mise au point de traitements contre
ces maladies ou toutes autres lésions du système nerveux.
Si les scientifiques fondent autant d'espoir dans
ce projet c'est qu'il pourrait, à terme, permettre de développer une
technologie essentielle à la compréhension de maladies comme Alzheimer ou
Parkinson et de nouveaux traitements pour de nombreuses affections mentales.
Une étude primordiale, qui pourrait également ouvrir la voie à des progrès majeurs
en matière d'intelligence artificielle.
Source : National Instituts of Health
Source : National Instituts of Health
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Ces projets transforment les paramètres éthiques
de la recherche. De façon générale, la recherche sur le cerveau pose une série
de questions éthiques, par exemple lorsque les chercheurs mènent des
expériences sur les animaux. L’association de la puissance des ordinateurs à
des bases de données nécessite un cadre et une méthodologie bien particulière
et bien réfléchie. La communauté scientifique dans son ensemble doit former ces
règles. Et le public doit en être informé.
Ce qui semble clair, c'est que, de plus en plus, les progrès dans le domaine de la neurobiologie permettent aux scientifiques se rapprocher chaque jour pour obtenir une réponse définitive à la question : où se situe l'intelligence ? Nous savons quelle partie est héritée, quelle partie est donnée par la formation de l'individu et que, peut-être, certains réseaux de neurones aient aussi quelque chose à dire. Ce qui semble évident est que le compte à rebours pour la détection définitive de l'origine de l'intelligence humaine a déjà commencé.
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