mercredi 25 janvier 2017

L'Enfant et les Écrans





Ils sont nés après Internet, et savent manier tablettes et Smartphone dès leur plus jeune âge. Et pourtant, ce n’est pas sans risque pour leur santé. Pour protéger les enfants, mieux vaut limiter le temps qu’ils passent devant un écran.

De nombreuses recherches se sont penchées sur le rôle des écrans dans le développement des tout-petits. La plupart ont conclu que la télévision n’était pas nécessairement bénéfique au développement des jeunes enfants. Certaines émissions éducatives pourraient toutefois avoir un effet positif sur leur développement.

La recherche soutient aussi que les interactions qu’un enfant a avec son entourage et son environnement sont la meilleure source de stimulation pour lui. Or, plus un enfant passe de temps devant un écran durant une journée, moins il lui en restera pour jouer et interagir avec les autres.

De plus en plus d’études scientifiques mettent en garde contre certains risques liés à une durée d’utilisation trop importante : par exemple des problèmes de retard de langage et de concentration chez les plus jeunes, de sommeil chez les adolescents, et globalement un déficit d’activité physique.


Un avis de l’Académie des Sciences


“ L’Enfant et les écrans” est un travail de l’Académie des Sciences publié en janvier 2013. Des chercheurs se sont interrogés sur la construction des fonctions cérébrales au regard des sollicitations extérieures sensorielles, affectives et culturelles dont l’exposition aux écrans numériques.

Les scientifiques qui ont coordonné cet avis (Jean-François Bach, Olivier Houdé, Pierre Léna et Serge Tisseron) tentent de répondre à ces questions que bien des adultes, parents, enseignants, animateurs multimédia, médecins et personnels de santé, associations, institutions se posent sur les risques de dépendance ou de phénomènes régressifs chez un enfant face aux écrans, la place des tablettes interactives et autres nouveaux supports dans l’apprentissage et la transmission des savoirs, comment réguler l’accès aux écrans sans l’interdire.

De cette nouvelle culture des écrans de la petite enfance à la fin de l’adolescence, l’Académie a rendu un Avis, assorti de 26 recommandations, sur les effets de l’utilisation des technologies par les enfants.

L’originalité de cet Avis est d’intégrer les données scientifiques les plus récentes de la neurobiologie, de la psychologie et des sciences cognitives, de la psychiatrie et de la médecine avec la réalité rapidement évolutive des technologies et de leur utilisation. Les auteurs invitent à la prise de conscience de la révolution en cours et du choc entre la traditionnelle culture du livre et la nouvelle culture du numérique. Ce texte présente les enjeux, les bénéfices et les risques de ce bouleversement en insistant sur la nécessité d’une pédagogie différenciée selon les âges.

Ils expliquent que l’utilisation de l’Internet et d’outils numériques variés a transformé d’abord les loisirs, puis l’apprentissage, l’éducation et la formation culturelle des enfants de tous âges. Cette évolution, qui apparait aujourd’hui irréversible, a des effets positifs considérables en améliorant l’acquisition des connaissances et des savoir-faire, mais aussi en contribuant à la formation de la pensée et à l’insertion sociale des enfants et des adolescents.

L’avis met en garde contre une utilisation trop précoce et une sur-utilisation des écrans qui a des conséquences délétères durables sur la santé, l’équilibre et les activités futures  intellectuelle, culturelle et professionnelle  ; un continuum existe entre les troubles de la concentration, du manque de sommeil et de l’élimination des autres formes de culture, et la pathologie des écrans, qui provoque d’éventuels comportements dangereux.

Le document inclut 26 recommandations qui esquissent les bonnes pratiques d’une éducation progressive, adaptée à chaque âge  avant 2 ans, entre 2 et 6 ans, entre 6 et 12 ans , pour préparer les adolescents (après 12 ans) à auto-réguler leur rapport au monde numérique. Les 6 dernières recommandations concernent les risques pathologiques d’un mauvais usage des écrans et la question de la violence.

De la tablette tactile à la télévision en passant par le Smartphone, l’Avis passe en revue la palette des écrans. Il prône une démarche de prévention et d’éducation pour protéger les enfants dans leur pratique d’utilisation et en appelle à la co-responsabilité  famille, enseignants, éditeurs-créateurs, pouvoirs publics  dans la conception et l’accessibilité de l’offre numérique  support et contenu  proposée aux enfants.

Risque de développer une pensée “zapping”. Revers de la médaille de ces jeux et d'Internet, ils risquent de développer une pensée trop rapide et superficielle  un effet zapping  et de créer un désintérêt pour tout ce qui n'est pas numérique. Pour Serge Tisseron, la première erreur à éviter est de considérer que nos enfants ont les technologies numériques dans le sang et les laisser se débrouiller. Sinon, on arrive à la situation catastrophique actuelle où trop d'enfants découvrent les technologies numériques tout seuls, au prix de douloureuses erreurs. Il ne faut pas non plus considérer les enfants comme des petits êtres à protéger, mais plutôt les prendre comme des partenaires, avec des capacités et des désirs. Il souhaite enfin mettre en avant les nombreux aspects créatifs et socialisants des nouvelles technologies, pas seulement les dérives.


Polémique : Laisser les enfants devant les écrans est préjudiciable


Des chercheurs, dirigés par Michel Desmurget, directeur de recherche en neurosciences à l'Inserm, affirment que l'Académie des sciences a tort de minimiser les effets de la télévision, d'Internet et des jeux vidéo sur les jeunes.

Une grande partie des affirmations avancées dans ce rapport sont dénuées de tout fondement scientifique et ne reflètent que les préjugés ou opinions des auteurs. Des milliers de recherches scientifiques signalent des influences délétères importantes de la télévision, d'Internet ou des jeux vidéo sur le développement intellectuel, la sociabilité et la santé, bien au-delà des premiers âges de la vie et pour des consommations largement inférieures à deux heures quotidiennes.

Quelques travaux montrent que certains jeux vidéo peuvent améliorer certaines capacités périphériques d'attention et de sélection visuelle. Cependant, selon les termes mêmes de l'avis, ces jeux vidéo sont "souvent" des "jeux violents".

Or, les jeux vidéo violents, déconseillés pour la plupart aux moins de 16 ans, voire 18 ans, sont associés, comme l'indique l'Académie américaine de pédiatrie à une variété de problèmes physiques et mentaux chez les enfants et les adolescents.

Pas sûr, dès lors, que le rapport bénéfice/risque soit positif. Les auteurs de l'avis négligent à la fois de citer la moindre étude corroborative et de prendre en compte une masse imposante de résultats contraires à leurs propos.

Par exemple, rien n'est dit de toutes les études scientifiques et institutionnelles, comme celle du Programme for International Student Assessment (PISA), liant causalement la consommation numérique, interactive ou non, des enfants et adolescents avec l'existence de troubles de l'attention et de difficultés scolaires.

Rien non plus sur les évaluations indépendantes du département de l'éducation américain montrant que les onéreux logiciels éducatifs sont parfaitement inefficaces. Rien encore sur le fait qu'aux Etats-Unis, face à ces observations, des écoles initialement en pointe dans le domaine numérique retirent aujourd'hui les ordinateurs des salles de classe.

Rien sur la sédentarité et ses effets sur l'espérance de vie, rien sur l'alcoolisation et le tabagisme (la télévision est le premier facteur d'entrée dans le tabagisme des adolescents), rien sur les troubles du comportement alimentaire, rien sur la violence scolaire, etc. Des milliers d'études, de revues de la littérature et de méta-analyses (impliquant jusqu'à 130 000 individus) confirment cette influence, dont l'ampleur est comparable à celle qui associe cancer du poumon et tabagisme.

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Les écrans  télévision, ordinateur, tablette et téléphone intelligent  font maintenant partie du quotidien de la plupart des familles. Bien qu’ils soient divertissants et pratiques dans certaines situations, les écrans peuvent comporter plusieurs désavantages pour la santé et le développement des enfants. C’est pourquoi il est conseillé d’en encadrer l’usage.

Une trop grande exposition aux écrans diminue le temps que les enfants passent à bouger au quotidien. En effet, l’utilisation des écrans se fait souvent au détriment des activités physiques et du jeu libre.

Le manque d’activité physique et la sédentarité pourraient également nuire au développement des habiletés motrices comme marcher, courir, lancer, sauter, ramper, etc. Ces habiletés motrices sont indispensables au développement global de l’enfant.


Les autres effets sur le développement


Selon plusieurs études, une trop grande exposition aux écrans en bas âge pourrait nuire également :

* au développement du langage;
* à la qualité du sommeil;
* à l’attention;
* au comportement (agressivité, passivité, estime de soi);
* à la réussite scolaire;
* à la santé en général (outre l’obésité et le surplus de poids : fatigue, maux de tête, problèmes de posture, mauvaise alimentation, hypertension, diabète de type 2, problèmes cardiovasculaires à long terme, etc.).


Nouvelles recommandations de l’Académie américaine de pédiatrie (octobre 2016)


Le principe “pas d’écran avant 2 ans” reste d’actualité. Un conseil qui remonte à 1999, avant l’introduction des tablettes et qui concernait surtout les postes de télévision, devant lesquels les enfants sont passifs. La seule exception indiquée par l’AAP, ce sont les vidéo-chats comme Skype.

En raison de l’immaturité de leur cerveau, les tout-petits n’arrivent pas à transférer la vision bi-dimensionnelle de l’écran au monde réel. Ils ont besoin d’une exploration tactile et d’une interaction sociale avec des adultes de confiance pour acquérir le langage, développer des compétences cognitives, des capacités motrices et socio-émotionnelles.

Là où l’académie révise son texte, c’est concernant le temps passé devant les écrans par les enfants âgés entre 2 et 5 ans, passant de deux heures à une heure par jour  et toujours en compagnie d’un adulte. Elle ne fixe en revanche pas de limite pour les enfants plus âgés, mais suggère d’éteindre les appareils une heure avant qu’ils se couchent, de les débrancher pendant les repas et de créer dans la maison des zones “interdites aux écrans”.

* Eviter toute utilisation d’écran si l’enfant est âgé de moins de 18 mois, et privilégier des programmes éducatifs pour introduire les 18-24 mois aux écrans, en les accompagnant pour leur expliquer le contenu.

* Pour les 2-5 ans, il est important d’imposer une limite de temps : une heure d’écran par jour maximum. Toujours en les accompagnant pour les aider à comprendre ce qu’ils regardent.

* Pour les enfants de 6 ans et plus, imposer des limites cohérentes sur le temps consacré à l’utilisation des écrans, contrôler le type d’écran utilisé, et faire en sorte qu’ils ne prennent pas la place d’un sommeil suffisant, de l’activité physique et d’autres comportements essentiels à la santé.

* Imposer des moments obligatoires sans écrans ensemble, par exemple au moment du dîner, sur la route en voiture et dans la chambre à coucher.

* Avoir une communication permanente sur la citoyenneté et la sécurité en ligne, y compris sur le respect des autres en ligne et hors ligne, et sur la protection de la vie privée.


Les écrans sont officiellement nocifs pour le cerveau des enfants


Dans un rapport de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) publié en juillet 2016, les ondes électromagnétiques peuvent avoir un effet sur les fonctions cognitives des enfants et en particulier sur la mémoire, l’attention et la coordination. L'ANSES incite à modérer l’utilisation des écrans connectés chez les moins de 13 ans.

Des effets néfastes sur les fonctions cognitives


Le crâne d’un enfant est moins épais que celui d’un adulte et en constante croissance. Leur cerveau est plus exposé aux effets néfastes des ondes électromagnétiques. Certaines zones des hémisphères sont plus touchées comme celles de la mémorisation, de la coordination et de l’attention.

Outre l’effet des ondes, la simple utilisation d’un téléphone mobile altère le bien-être des enfants. Dépression, fatigue, stress et anxiété, troubles de l’humeur et du sommeil, peuvent résulter d’un usage trop fréquent des Smartphones.

Des effets sur le développement encore méconnus


En raison du manque de données et d’études relatives à l’utilisation des Smartphones chez les enfants, l’Anses ne peut faire de conclusions quant aux effets sur le comportement, les fonctions auditives, le développement, le système reproducteur ou immunitaire ou le développement de cancer.

Elle recommande une exposition modérée aux tablettes tactiles et Smartphones pour les enfants de moins de 13 ans. Elle conseille aussi d’utiliser un kit main libre lors d’appels téléphoniques, d’éviter les communications le soir qui perturbent le rythme du sommeil ainsi que de modérer l’utilisation des produits connectés et ceux émettant des radiofréquences destinés aux enfants (les jouets radio télécommandés, les baby-phones,  les walkie-talkies, les robots interactifs).


L’utilisation appropriée de la technologie permet d’accéder à une plus grande connaissance et de divertissement. Cependant, il est important de mettre en évidence que l’impact positif résulte du bon usage et prudent de la technologie. Les enfants qui grandissent devant les écrans non seulement courent un plus grand risque de tomber dans un style de vie sédentaire, mais courent également le risque de subir des retards de développement et à l’avenir, avoir du mal avec les relations interpersonnelles. Les parents devraient donc jouer un rôle actif dans la planification du temps d’écran de leurs enfants et tout en le faisant, analyser leur propre temps d’écran.


lundi 16 janvier 2017

Dépression de l'Enfant et Prescription d'Antidépresseurs



Les antidépresseurs peuvent être dangereux si le diagnostic n’est pas exact



Une des causes possibles de la dépression est un déséquilibre de certaines substances chimiques présentes dans le cerveau. Les antidépresseurs sont des médicaments qui contribuent à restaurer l'équilibre de ces substances chimiques, permettant ainsi une transmission plus efficace des signaux nerveux dans le cerveau. En ciblant certaines substances chimiques du cerveau  sérotonine, noradrénaline, dopamine , les antidépresseurs contribuent à la régulation de l'humeur et à la réduction des symptômes. Il existe des traitements qui agissent à la fois sur les symptômes émotionnels et les symptômes physiques incommodants de la dépression. Il existe aussi des produits de santé naturels approuvés dans le soulagement des symptômes de la dépression.

Pompe à recaptage de la
 sérotonine (points roses)
A la toute fin des années 80, une nouvelle classe de médicaments antidépresseurs apparaît sur le marché : ce sont les ISRS (inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine) avec comme chef de file la fluoxétine dont le nom commercial est Prozac.

Schématiquement, le mode d'action des ISRS est le suivant : ils augmentent la production de sérotonine, un neuromédiateur secrété par le cerceau et impliqué dans de nombreux comportements  euphorie, bien-être, plaisir . Plus exactement, ils limitent la destruction de la sérotonine, une fois qu'elle a été naturellement produite par l'organisme.

Depuis quelques années, la prescription de ces médicaments chez les enfants fait l'objet d'une mise en garde sérieuse, certaines études ayant mis en évidence un risque de suicide accru chez ceux ainsi traités.


Les antidépresseurs chez l'enfant en débat


Les auteurs d’une étude américaine, publiée en 2012 dans The archives of General Psychiatry, ont réétudié quatre essais cliniques portant sur l'administration de fluoxétine chez des enfants et des adolescents et montrent, en intégrant différents critères d'évaluation, qu'il n'y a finalement pas de relation significative entre ce traitement et les idées et comportements suicidaires chez les 7-18 ans, même en cas d'efficacité du médicament sur les symptômes dépressifs.

Cette étude ne serait pas dénuée de critiques. Les enfants et les adolescents ont des comportements et des réponses très différentes aux traitements et chaque individu réagit lui-même de façon indépendante à la maladie ou à sa prise en charge au sein de chaque tranche d'âge.

En 2004, l'analyse des effets indésirables de 25 études cliniques portant sur huit antidépresseurs de la classe des inhibiteurs de recapture de la sérotonine utilisées dans différentes tranches d'âge révélait une augmentation du risque d'idées et de comportements suicidaires chez les mineurs ayant pris ces traitements, même si aucun passage à l'acte n'avait été à déplorer. Deux ans plus tard, l'Agence américaine du médicament étendait son alerte aux jeunes adultes jusqu'à 25 ans.

L'Agence américaine du médicament a alors imposé à tous les fabricants un gros cadre noir appelé “black box warning” sur les notices, signifiant clairement ce risque aux utilisateurs. Selon l'Agence du médicament américaine, ces médicaments augmenteraient le risque d'idées suicidaires entre 8 et 18 ans, voir 25 ans, y compris en cas de bénéfice sur les symptômes dépressifs.

L'Agence française du médicament émet en 2006 ses propres recommandations et déconseille l'usage des antidépresseurs inhibiteurs de la recapture de sérotonine à l'exception de la fluoxétine dans le traitement de la dépression chez l'enfant et l'adolescent en raison d'un risque de comportement suicidaire (idées suicidaires, tentatives de suicide) et/ou hostile (agressivité, comportement d'opposition, colère).

Certaines études ont révélé que, dans le cerveau encore en développement des enfants, les drogues de type Prozac pourraient interférer avec le schéma normal de croissance cérébrale. Malgré leur caractère préliminaire, de tels travaux suggèrent que les enfants traités par des antidépresseurs pourraient passer d'un trouble psychiatrique à un autre. Traités dans certains cas dès l'école maternelle, ces enfants trouveraient dans ces médicaments un soulagement à court terme, mais présenteraient un risque de devenir ultérieurement des adultes nerveux et anxieux.

Amir Raz, professeur de neurosciences cliniques au Département de psychiatrie de l'Université McGill, est l'un des rares chercheurs à s'interroger sur l'utilisation des antidépresseurs chez l'enfant et l'adolescent. Selon lui, le cerveau humain se développe exponentiellement pendant ces jeunes années, et l'exposition aux antidépresseurs est susceptible de perturber le câblage du cerveau, particulièrement en ce qui concerne certaines régions impliquées dans le stress, les émotions et leur régulation.


David Rosenberg, chef du Département de Psychiatrie des enfants et des adolescents à la Wayne State University, utilise le scanner du cerveau pour observer les enfants et les adolescents déprimés, affichant des changements impressionnants dans la chimie du cerveau. Ses recherches portent sur le messager chimique glutamate. Le glutamate est l’interrupteur dans le cerveau. Si la sérotonine est l’éclairage dans la salle, le glutamate est l’interrupteur qui allume et éteint la sérotonine.

Rosenberg a découvert qu’un faible niveau de glutamate dans certaines parties du cerveau est relié à la dépression. Et l’effet des antidépresseurs est clair : après traitement, le glutamate retourne à la normale et les symptômes de la dépression se réduisent. Il estime que lorsque les antidépresseurs sont prescrits correctement, ils font plutôt du bien que du mal.


Seul un antidépresseur sur quatorze est efficace contre la dépression de l’enfant et l’adolescent


Une étude de l’université d’Oxford et de l’université de Chongqing, parue dans la revue scientifique britannique The Lancet en juin 2016, relève que la plupart des antidépresseurs disponibles ne sont guère efficaces et ne sont pas supérieurs au placebo.

Cette méta-analyse porte sur trente-quatre études incluant 5 260 participants de 9 à 18 ans. Une vingtaine de spécialistes de différents pays ont scruté plusieurs bases de données d’essais cliniques publiés, portant sur le traitement aigu du trouble dépressif majeur chez les enfants et les adolescents, en comparant les effets de quatorze antidépresseurs sur quatre semaines de traitement.

Les essais inclus dans l’analyse ont évalué les effets des 14 antidépresseurs, et l’équipe a qualifiée l’efficacité de chaque médicament à l’aide de quatre critères :

Efficacité  déterminée par des changements dans les symptômes dépressifs et la réponse au traitement.
Tolérance  si l’utilisation de médicaments a été interrompue en raison d’effets indésirables.
Acceptabilité  si l’utilisation de médicaments a été suspendue en raison de toute cause.
Association à de graves dommages  si les médicaments ont augmenté de pensées ou actes de suicide ou d’autres dommages sévères.

Par rapport aux placebos et autres sept antidépresseurs, on a conclu que la nortriptyline avait une efficacité inférieure.

Les anti-dépresseurs imipramine, venlafaxine et duloxétine, les chercheurs ont observé que c’était pire quand il s’agissait de tolérance ; Il y avait beaucoup plus d’interruptions avec ces médicaments qu’avec un placebo.

Par rapport aux placebos et autres cinq médicaments antidépresseurs, il a été trouvé que la venlafaxine augmentait le risque de pensées suicidaires et de tentatives.



Les données utilisées pour la méta-analyse en réseau :


* les cercles représentent les médicaments : plus le diamètre augmente, plus le nombre de participants ayant pris cette substance augmente (placebo > fluoxétine > duoxétine, etc.) ;
* les traits représentent les comparaisons directes effectuées (essai clinique) entre 2 traitements : plus les traits sont épais, plus le nombre d'essais est élevé (fluoxétine vs placebo, paroxétine vs placebo) ;
* en l'absence de trait entre 2 substances, une comparaison indirecte peut être effectuée : fluoxetine vs placebo et placebo vs clomipramine => comparaison indirecte entre fluoxétine et clomipramine.

Résultat : sur les quatorze antidépresseurs, seule la fluoxétine (Prozac) a été plus efficace  plus d’avantages que de risques  que le placebo pour soulager les symptômes de la dépression.

Les données de tous les essais comparant un antidépresseur avec un placebo ou un autre antidépresseur actif, en mono-thérapie, par voie orale, dans le traitement du trouble dépressif majeur chez les enfants et les adolescents ont été collectées à partir de différentes bases de données disponibles dans le monde.

En pratique, le soutien psychologique reste la priorité pour prendre en charge une dépression de l'enfant ou de l'adolescent. En cas d'échec, d'impossibilité d'accès à la psychothérapie ou de dépression sévère d'emblée, et lorsqu'un traitement pharmacologique paraît nécessaire, les auteurs estiment, au diapason des recommandations françaises, que la fluoxétine reste la meilleure option à considérer.

Les enfants et les adolescents qui prennent des antidépresseurs doivent être très surveillés, quel que soit l’antidépresseur choisi, en particulier au début du traitement.


Les antidépresseurs et leurs effets sur le cerveau des adolescents


Les antidépresseurs sont d'abord conçus et testés pour les adultes, leur impact sur le cerveau des individus beaucoup plus jeunes n'est pas encore complètement identifié. Certains chercheurs se préoccupent de l'effet d'antidépresseurs comme le Prozac sur le développement du cerveau chez les enfants et les adolescents.

Le cerveau humain se développe de façon exponentielle lorsque l'on est très jeune et la prise d'antidépresseurs peut affecter les connexions qui se font à l'intérieur du cerveau, en particulier les connexions relatives au stress, aux émotions et à leur régulation.


Antidépresseurs et suicide chez les jeunes


Les médicaments antidépresseurs peuvent augmenter le risque d'avoir un comportement et des pensées suicidaires chez certains adolescents. Le risque de suicide est particulièrement grand durant les deux premiers mois du traitement. Certains jeunes adultes sont même encore plus sujets à risque lorsqu'ils prennent des antidépresseurs, surtout ceux qui souffrent de troubles bipolaires, qui ont des membres de leurs familles atteints de troubles bipolaires ou qui ont déjà fait des tentatives de suicide.

Les signaux d'alerte sont l'apparition de nouveaux symptômes ou l'aggravation des symptômes déjà présents tels que l'agitation, l'irritabilité ou la colère. Des changements de comportements inhabituels doivent aussi être pris en considération.

Les médicaments antidépresseurs doivent être prescrits dans le respect des règles de bonne pratique : diagnostic d’épisode dépressif majeur ou de trouble relevant de ce type de traitement, posologie et durée de prescription adéquats.

L’efficacité des antidépresseurs sur les symptômes émotionnels dépressifs ou anxieux est désormais bien établie : le risque de facilitation de conduites suicidaires par ces molécules est cependant mentionné. Mieux prescrire les antidépresseurs repose sur un meilleur repérage des symptômes justifiant le diagnostic d’épisode dépressif ou de trouble anxieux y compris chez l’enfant et l’adolescent, sur un suivi attentif de l’évolution des symptômes.

Il n’existe pas d’antidépresseurs spécifiquement recommandés pour les enfants et les adolescents. Certains sont plus souvent prescrits aux jeunes parce qu’ils induiraient moins d’effets secondaires négatifs. C’est le cas des psychotropes de la classe des ISRS (inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine) comme la fluoxétine, la paroxétine et l’escitalopram.


Psychothérapie et antidépresseurs


La place, la question de la prescription de psychotropes dans la dépression de l’enfant demeure délicate, voire inconfortable ; divers paramètres étayent ce constat. Tout d’abord, l’administration de médicaments agissant sur le jeune cerveau suscite chez l’enfant et son entourage malaise et réticences. A cet égard, les connaissances en matière de chimie cérébrale, des retentissements sur le fonctionnement, entre autres, des neurotransmetteurs, des modifications sur le développement de certains circuits sous-corticaux et corticaux sous l’impulsion d’antidépresseurs sont encore balbutiantes.

Dans certaines situations très précises de dépression majeure, la prescription demeure possible mais doit être très raisonnée et effectuée par un spécialiste pour une évaluation rigoureuse de l'état du patient.

C'est tout un ensemble de mesures de soins et d'accompagnement, pouvant inclure le traitement antidépresseur, qui va créer des conditions de sécurité et de confiance, pour essayer de prévenir au mieux les éventuels risques de passage à l'acte. Il est absolument indispensable d'assurer un suivi sérieux, en particulier durant le 1er mois de traitement.

La médication antidépressive peut soutenir l’enfant et son entourage à se mettre au travail d’élaboration, le favoriser en réactivant probablement les circuits de transmission cérébrale déficients et en stimulant une démarche active, volontaire chez le sujet.

Si les antidépresseurs sont parfois indispensables et qu'ils préviennent le risque suicidaire chez certains déprimés enfermés dans une logique morbide, ils ne sont jamais suffisants seuls. Si on donne uniquement des antidépresseurs, sans offrir dans le même temps un soutien psychologique, on risque de faire disparaître les "défenses" même imparfaites mises en place par l'organisme et ce sans avoir apaisé suffisamment la douleur psychique.

Ces prescriptions doivent être réservées à l’hôpital et ne pas être effectuées en médecine générale, afin de regarder de près d’éventuels effets secondaires, surtout le risque suicidaire.

Il y a un consensus : la psychothérapie reste le traitement de première intention. Par contre, il ne faudrait pas que la prescription entrave la démarche psychothérapeutique nécessaire.


Recommandations


1) Les critères utilisés pour l’aide au diagnostic de trouble dépressif notamment dans les enquêtes épidémiologiques et les outils de mesure de l’intensité des symptômes dépressifs et de l’évolution sous l’action des traitements pharmacologiques doivent être enseignés à tout médecin : ils sont une aide au repérage de la symptomatologie et aux décisions thérapeutiques, en particulier prescrire ou ne pas prescrire un antidépresseur.

2) Bien prescrits les antidépresseurs ont un effet anti suicidaire. Cependant la mise en route d’un traitement antidépresseur doit se faire après évaluation des facteurs de risque de conduite suicidaire. Les règles de bonnes pratiques doivent être respectées : réévaluation hebdomadaire de l’état du patient pendant le premier mois, bimensuelle pendant le 2ème mois au moins mensuelle ensuite, posologie réduite chez les sujets âgés ou fragilisés par un handicap mental.

3) Des études portant sur les effets des antidépresseurs chez l’enfant sont hautement souhaitables :

* pour en évaluer l’efficacité selon l’âge de l’enfant,
* pour apprécier les conséquences neuro-développementales et biologiques de l’introduction de tels agents sur un cerveau en développement.

La primo-prescription d’un antidépresseur chez les sujets de moins de 18 ans doit être réservée aux médecins spécialistes en pédiatrie et/ou en psychiatrie.

4) Certains états pathologiques nécessitent un traitement antidépresseur au long cours : la non disponibilité plus ou moins transitoire de certains médicaments antidépresseurs en officine devrait être prévenue par des actions adéquates des autorités de santé auprès des industriels concernés.

Un médecin doit toujours réfléchir avant de prescrire un antidépresseur à un enfant ou à un adolescent. En tout état de cause, cette prescription doit être clairement expliquée aux parents et au patient. La balance entre les bénéfices attendus et les risques éventuels doit être soigneusement pesée.


Importance d’une alimentation équilibrée pour une bonne santé mentale



La nutrition est essentielle au bon fonctionnement du cerveau, car il a besoin d’une certaine quantité de nutriments pour la formation des neurotransmetteurs, c'est-à-dire les messagers chimiques qui accompagnent les signaux électriques qui passent entre les neurones. Le régime méditerranéen  c'est-à-dire de nombreux légumes, fruits, céréales et poissons  réduit le risque de dépression entre 40 % et 50 %.