L'obésité est devenue la
première maladie non infectieuse de l'Histoire. C'est une véritable épidémie qui frappe aussi bien les
pays industrialisés que les pays en voie de développement. L'Organisation mondiale
de la Santé place actuellement sa prévention et sa prise en charge comme une
priorité dans le domaine de la pathologie nutritionnelle.
L’épidémie d’obésité n’a épargné aucun segment de la population, y
compris celui des bébés et jeunes enfants. L’obésité infantile peut affecter la
santé des enfants pour le reste de leur vie, étant associée à l’obésité à l’âge
adulte et aux nombreux problèmes de santé qui l’accompagnent.
L’obésité des enfants constitue l’un
des plus grands défis pour la santé publique au XXIème siècle. Tandis que 66
millions d’enfants en âge d’aller à l’école souffrent de la faim, 43 millions
d’enfants en âge préscolaire sont obèses. La prévention de l’obésité de
l’enfant doit être une grande priorité au niveau familial, national ainsi
qu’international.
Le nombre de nourrissons et de jeunes enfants (de 0 à 5 ans) en
surpoids ou obèses dans le monde s’est accru, passant de 32 millions en 1990 à
43 millions en 2013. Selon l’OMS si la tendance actuelle se poursuit, le nombre
de nourrissons et de jeunes enfants en surpoids atteindra 70 millions à
l’horizon 2025. Faute d’intervention, les nourrissons et les jeunes enfants
obèses le resteront vraisemblablement pendant leur enfance, leur adolescence et
à l’âge adulte.
En Europe, l'obésité infantile concerne entre 10 et 25% des enfants
(3,1% des enfants de 5 ans en France) et est aujourd'hui devenue un véritable
problème de santé publique.
L'obésité de l'enfant débute souvent très tôt, avant 5 ans, et semble
être déclenchée par la croissance extrême des premiers mois de vie. Déjà, à 5
ans, un premier facteur est souvent présent chez bien des petits : le
surpoids. Il quadruple leur risque d’être obèses à 14 ans.
L’obésité au début de la vie prédit l’obésité ultérieure et le risque
cardio-métabolique qui y est associé. Également, de sérieuses comorbidités
peuvent survenir dès l’enfance, dont l’asthme, les problèmes orthopédiques,
l’adversité psychosociale, le risque accru d’être admis à l’hôpital et, de plus
en plus, le diabète de type 2.
L’obésité a une forte tendance à se retrouver dans les environnements
socio-économiques défavorisés.
L'obésité infantile déterminée à l'âge de 5 ans
Selon une étude réalisée par des chercheurs de l’Université Emory à Atlanta, publiée dans la revue médicale New
England Journal of Medicine en janvier 2014, les enfants atteints de
surpoids à l'école maternelle ont quatre fois plus de risque que ceux d'un
poids normal de devenir obèse en classe de quatrième.
La professeur Solveig
Cunningham et son équipe se sont intéressés à une cohorte de 7738 enfants qui
ont été suivis de l’âge de 5 à 14 ans. Parmi ceux qui sont devenus obèses
pendant ces neuf ans, presque la moitié avait un excès de poids à la
maternelle. Mais déjà, à la naissance, plus de 36% étaient de gros bébés.
À 5 ans, 12,4% des
enfants étaient déjà obèses (IMC au 95e percentile) et 14,9% avaient un
surpoids (85e percentile). Les 6807 enfants qui ne présentaient pas d’obésité à
leur entrée à la maternelle ont été suivis jusqu’à 14 ans. Une fois cet âge
atteint, 20,8% étaient dorénavant obèses.
Les données montrent
que l’obésité apparaît surtout à un jeune âge. L’incidence annuelle était ainsi
de 5,4 % pendant l’année de maternelle et a ralenti pour atteindre 1,7% entre
11 ans et 14 ans.
L’embonpoint à un
jeune âge joue un rôle déterminant dans la survenue de l’obésité. Parmi les
sujets qui présentaient un surplus de poids à leur entrée à la maternelle, 31,8%
étaient obèses à 14 ans. À l’opposé, seulement 7,9% de ceux qui avaient un
poids normal à 5 ans étaient atteints d’obésité neuf ans plus tard.
Le poids à la
naissance est également un élément important. Parmi les sujets qui pesaient 4 kg
ou plus à la naissance, 22,5% étaient obèses à 5 ans et 31,2% à 14 ans.
Cependant, le cours de l’obésité pourrait peut-être être infléchi. Les enfants
qui pesaient plus de 4 kg à la naissance et avaient un surplus de poids à 5 ans
couraient cinq fois plus de risque de devenir obèses durant les neuf années
suivantes que ceux qui avaient un poids élevé à la naissance, mais normal à 5
ans.
Le statut
socioéconomique est par ailleurs un facteur clé. À l’âge de 14 ans, la
prévalence de l’obésité était de 11,4% chez les enfants des milieux les plus aisés
et de 24,1% dans les plus pauvres. Cet écart apparaissait déjà à la maternelle.
La conclusion des auteurs est claire, l’obésité commence à se
développer à un âge précoce dans plus de la moitié des cas. Des conclusions qui
incitent à la surveillance du poids et à l’éducation nutritionnelle chez les
jeunes enfants.
Grossesse : 5 facteurs identifiés de risque d'obésité pour l’enfant
Dans une étude britannique, publiée dans l’American Journal of Clinical Nutrition en février
2015, sont évalués 5 principaux facteurs de risque, identifiés autour de la
grossesse, qui vont favoriser de manière significative le risque d’obésité pour
l’enfant, en particulier lorsqu’ils sont combinés.
Les scientifiques ont observé cinq facteurs de risque, 4 facteurs maternels durant la grossesse, qui
pourraient selon cette étude être des clés de prévention de l’obésité
infantile.
1. Une courte durée d’allaitement,
inférieure à 1 mois
2. Obésité
3. Excès de prise de poids
4. Tabagisme
5. Insuffisance de vitamine D
Cette nouvelle recherche, menée sur 991 enfants participant à la cohorte Southampton Women’s Survey – réunissant des mères recrutées avant
leur grossesse – suggère que de réunir un plus grand nombre de ces facteurs de
risque c’est fort prédictif d’être en surpoids ou obèse dans l’enfance.
* À l’âge de 4 ans, les enfants exposés à 4 ou 5 de ces facteurs de
risque sont 4 fois plus susceptibles d’être en surpoids ou obèses que les
enfants non exposés du tout, avec une masse adipeuse plus élevée de 19% en
moyenne.
* À l’âge de 6 ans, ces enfants sont 4,65 fois plus susceptibles d’être
en surpoids ou obèses et leur masse adipeuse est, en moyenne, 47% plus élevée.
Et ces conclusions interviennent après prise en compte de la qualité de
l’alimentation ou des niveaux d’activité physique des enfants.
Les tout débuts de la vie sont une période critique de régulation de
l’appétit et de l’équilibre énergétique, avec des conséquences pour le
métabolisme et le poids à vie. Les chercheurs appellent à mettre en œuvre des
interventions de prévention de l’obésité très tôt et même avant la conception.
Enfin, on remarque l’impact de 2 facteurs importants également, le
tabagisme de la mère et l’allaitement de l’enfant.
Facteurs contribuant à l’obésité chez l’enfant
Tous les aspects de l’environnement
dans lequel l’enfant est conçu, naît et est élevé, peuvent contribuer au risque
de surpoids ou d’obésité.
Le monde de plus en plus urbanisé et
numérisé offre de moins en moins l’occasion de pratiquer une activité physique
salutaire sous forme de jeu. Le surpoids ou l’obésité réduit encore les
possibilités qu’ont les enfants de participer à des activités physiques
collectives. Ils deviennent alors moins actifs encore sur le plan physique,
d’où le risque d’engrenage ultérieur.
Les facteurs de risque clés de l’obésité chez les enfants sont l’indice
de masse corporelle (IMC) des parents et le gain de poids pendant la grossesse.
Par conséquent, les approches de prévention devraient cibler non seulement les
enfants, mais aussi les adultes. C’est important la surveillance du poids
pendant la gestation. Ce facteur serait crucial dans la prévention précoce de
l’obésité chez les enfants.
La principale cause du surpoids et de l’obésité de l’enfant est un
déséquilibre énergétique entre les calories consommées et les calories
dépensées. Cela est causé surtout par une consommation accrue d’aliments très
énergétiques à haute teneur en graisses et en sucres, mais contenant trop peu
de vitamines; ainsi qu’une tendance à la diminution de l’activité physique en
raison de la nature sédentaire de nombreuses formes de loisirs.
Facteurs génétiques. L'intervention de plusieurs
gènes est nécessaire (hérédité
polygénique). Dans ce cas, le sujet est prédisposé à l'obésité
dans un environnement et des mauvais comportements alimentaires.
Facteurs endocrinologiques. Dérèglements hormonaux ou glandulaires (hypothyroïdie, hypercorticisme,
tumeur hypophysaire...).
Facteurs psychologiques. Anxiété, dépression,
boulimie... peuvent intervenir en perturbant le comportement alimentaire ou en
modifiant le bilan énergétique.
Comportement alimentaire
Le manque d’information sur la façon
de bien se nourrir et le fait que les aliments sains soient peu disponibles ou
abordables contribuent au problème. La commercialisation offensive des aliments
et des boissons énergétiques auprès des enfants et des familles l’exacerbe
encore davantage.
Dans certaines sociétés, les normes
culturelles enracinées de longue date (comme l’idée largement répandue qu’un
gros bébé est un bébé en bonne santé) pourraient peut-être encourager les
familles à suralimenter leurs enfants.
Dans la petite enfance l'enfant peut consommer les mêmes aliments qu'un adulte mais
l'attention doit se porter sur les quantités qui doivent progressivement
augmenter selon les besoins.
Il faut lui apprendre à structurer sa journée sur les repas, et il ne
faut pas le laisser manger tout au long de la journée. C'est à cet âge qu'il
faut lui apprendre à ne pas grignoter entre les repas, car l'alternance entre
repas et période de satiété est essentielle pour la régulation nutritionnelle
et pour l'établissement de ses capacités à ajuster sa consommation alimentaire.
Le choix d’une alimentation saine
pour les nourrissons et les jeunes enfants est décisif car les préférences
alimentaires s’établissent très tôt. Donner aux nourrissons des aliments
énergétiques, riches en graisses, en sucres et en sel est l’un des principaux
facteurs de l’obésité infantile.
Allaitement maternel
L’allaitement exclusif au sein jusqu'à l’âge de six mois est un bon
moyen d’empêcher les nourrissons de devenir obèses.
* la mise au sein de l’enfant dans l’heure qui suit la naissance;
* l’allaitement exclusif au sein pendant les six premiers mois de la
vie.
L’introduction d’aliments de complément (solides) sûrs et adaptés sur
le plan nutritionnel à 6 mois, tout en poursuivant l’allaitement maternel
jusqu’à l’âge de deux ans et au-delà.
L’enseignement aux familles est important. Principalement auprès des
nouveaux parents. Surtout si l’un des deux est obèse. On peut leur dire que ce
serait bien de prolonger l’allaitement le plus longtemps possible et de retarder
l’introduction des solides.
Introduction d’aliments de complément
L’introduction prématurée d’aliments solides. Si l’enfant est trop
nourri à cause de la prise de solides, le résultat est prévisible : le
surpoids. Le nombre de calories ingurgitées devient nettement supérieur à celui
qui est métabolisé. Le bébé ne fait pratiquement que dormir ou manger à cet
âge.
Les aliments de complément doivent être riches en nutriments et donnés
en quantités adéquates. À 6 mois, les personnes qui s’occupent de l’enfant
devront introduire les aliments en petites quantités et augmenter
progressivement les rations à mesure que l’enfant grandit. Les jeunes enfants
doivent avoir une alimentation variée, comprenant de la viande, du poisson et
des œufs aussi souvent que possible.
Le rebond d’adiposité précoce
La corpulence d'un enfant est très bien représentée par l'indice de
masse corporelle, l'IMC (IMC = poids /taille²).
La courbe de l'IMC pendant la croissance évolue avec l'âge en trois
phases :
* Avant l'âge de 2 ans, la corpulence augmente et en général, à l'âge de
1 an l'enfant est rond et potelé.
* La corpulence décroît après 2 ans et l'enfant semble plutôt maigre
(on dit qu'il déboule) jusqu'à l'âge de 6-7 ans.
* Vers l'âge de 8 ans, on assiste à une nouvelle remontée de la courbe
; cette période s'appelle le "rebond adipositaire".
Des facteurs ont agi très précocement dans la vie de l'enfant. Une
étude a montré que des facteurs alimentaires – et notamment la part d'énergie
apportée par les protéines entre 0 et 2 ans – peuvent être reliés à la
précocité de l'âge du rebond.
Une alimentation au tout début de la vie trop riche en protéines et
trop pauvre en acides gras essentiels, favoriserait la multiplication des
cellules graisseuses et donc une remontée de la courbe d'IMC. De cette
observation les pédiatres pensent que la diversification ne doit pas être trop
précoce et que les portions doivent être augmentées progressivement.
En général l'âge du rebond est beaucoup plus précoce chez les enfants
obèses (3 ans en moyenne au lieu de 6 ans chez les enfants de poids normal).
Agir avant la naissance
Ce qu’il faut surtout éviter : l’apparition de l’obésité chez
l’enfant. L’atteinte du 95e percentile de l’IMC. Une fois présent,
le problème est difficile à soigner. Dès le départ, certains facteurs
pourraient être déterminants.
Certaines mesures peuvent être adoptées pour prévenir efficacement
l’obésité chez l’enfant :
* Le diabète de grossesse doit être traité. Cela permet entre autres de
réduire le risque de macrosomie à la naissance, même si l’on n’a pas prouvé que
l’on diminuait ainsi le risque d’obésité.
* La réduction du taux de césarienne est déjà un objectif de santé
publique.
En ce qui concerne le sommeil, une bonne hygiène est toujours
recommandable, même chez les bébés.
* L’âge idéal pour commencer la nourriture solide semble être de 4 à 6
mois pour éviter les allergies.
* Il est important de cibler d’emblée les familles à risque sur le plan
génétique. Durant toute la grossesse, il faut vraiment insister auprès de la
femme enceinte sur les éléments qui permettront de réduire la probabilité
d’obésité chez l’enfant.
Les conséquences de l’obésité chez l’enfant
Les enfants obèses ou en surpoids sont plus susceptibles d’être malades
et ont besoin d’un suivi médical plus poussé que les enfants qui ne présentent
pas de surpoids. Ces enfants sont aussi plus susceptibles de devenir des adultes
avec des problèmes de poids, et ont un risque plus élevé de morbidité,
d’incapacité et de mortalité prématurée à l’âge adulte.
A court terme
* Complications respiratoires :
dyspnée d’effort ou permanente, syndrome d’apnées du sommeil (somnolence et
endormissement diurnes).
* Complications orthopédiques :
lombalgies, genu valgum, augmentation de l’incidence des fractures,
trouble de la marche, pieds plats, arthrose de la hanche précoce chez l’adulte.
* Complications
cardiovasculaires : l’hypertension artérielle est 3 fois plus élevée chez
les enfants obèses. Hausse des triglycérides (graisses
dans le sang).
* Troubles de métabolisme
glucidique : diabète de type 2 infantile. Il faut rechercher
systématiquement vers 10 ans chez un enfant obèse ayant des antécédents
familiaux de diabète et/ou un ou plusieurs signes évoquant une
insulino-résistance (tour de taille élevée, hypertension artérielle,
hyperlipidémie, syndrome des ovaires polykystiques), et d’autant plus qu’il
s’agit d’un enfant appartenant à une population à risque (Afrique du Nord, Antilles,
Polynésie, Hispano-Américains).
Responsabilité de parents. Les parents peuvent encourager les enfants à aller à pied ou à vélo à
l’école, ou pour se rendre à diverses activités sociales. Ils peuvent également
leur faire prendre tous les jours un petit déjeuner sain avant d’aller à
l’école. Nourrir son enfant sainement est essentiel et a des conséquences tout
au long de sa vie.
On devrait évaluer régulièrement, chez tous les bébés et enfants, la
présence d’un surplus de poids ou d’un gain de poids trop rapide, en utilisant
des techniques de mesures standard et les courbes de croissance appropriées. La
période postpartum représente une bonne opportunité de promouvoir des
comportements sains qui peuvent non seulement améliorer la santé à long terme
de la mère et donner un exemple souhaitable aux enfants, mais aussi optimiser
la santé maternelle avant une prochaine grossesse.
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