samedi 9 avril 2016

Trouble de l'Intégration Sensorielle chez l'Enfant Autiste



Les informations sensorielles ne sont pas traitées par le cerveau
 correctement chez les personnes autistes

Le traitement de l’information sensorielle parfois nommé intégration sensorielle, réfère au processus par lequel le cerveau reçoit un message par le biais des sens et le transforme en réponse comportementale adaptée.

La sensorialité est le domaine qui se rapporte aux sens, à la façon dont les informations sensorielles sont véhiculées, la façon dont elles sont traitées et la façon dont on répond.

Un trouble de l’intégration sensorielle (TIS) est un dysfonctionnement cérébral important qui affecte l’enfant durant son développement et qui peut être présent dès la naissance. Les enfants atteints perçoivent mal les stimuli qu’ils reçoivent tous les jours par le toucher, les sons et le mouvement. Ils peuvent se sentir bombardés d’information sensorielle, rechercher des expériences intenses ou éprouver d’autres problèmes, ce qui peut entraîner des troubles de comportement, une mauvaise coordination, une mauvaise estime de soi, etc. Ces enfants sont souvent mal compris et étiquetés comme étant agressifs ou maladroits. Ils sont généralement socialement isolés et éprouvent des difficultés à l’école.

Les problèmes sensoriels entraînent fréquemment des difficultés sur les plans scolaire et social. Ils ont un impact sur les interactions avec les pairs, les apprentissages, la concentration, la coordination, le niveau d’activité, etc.

Nos sens


Quand on parle de sens, on pense immédiatement aux 5 sens externes : la vue, l'ouïe, l'odorat, le goût et le toucher. Il existe cependant encore deux autres sens internes : le sens de l'équilibre et la proprioception.

Nos organes de l'équilibre détectent les rotations ou les mouvements circulaires du corps dans toutes les directions et ont de ce fait, un grand effet sur la sensation d'équilibre et de mouvement. Nous avons des cellules sensorielles internes qui nous donnent des informations sur notre posture et sur les mouvements que nous faisons avec notre corps ou certaines de ses parties : c'est ce que l'on appelle la proprioception.

Nous sommes des êtres sensoriels, nous vivons, échangeons et apprenons par l'intermédiaire de nos sens.

Chez la personne autiste, les perceptions sensorielles sont affectées et peuvent être très perturbantes. Il est très difficile pour les enfants autistes de moduler leurs influx sensoriels. Ainsi la vue, l’ouïe, l’odorat, le goût, le toucher mais aussi le sens de l’équilibre et la proprioception, qui sont tous deux étroitement corrélés, oscillent entre hypersensibilité et hypo sensibilité. Ces dysfonctionnements parfois très handicapants, causent beaucoup de stress et créent des comportements inadéquats.

Pour comprendre la sensorialité chez la personne avec autisme, il faut différencier trois processus :

* La sensation, qui est le recueil des stimuli sensoriels, leur transmission au cerveau qui va traiter ces informations sensorielles.
* La perception, qui est l'interprétation de ces informations sensorielles. Pour simplifier c'est le processus qui leur donne du sens.
* La modulation sensorielle, qui permet de filtrer, de hiérarchiser ces informations sensorielles.

Les informations sensorielles ne sont pas traitées par le cerveau correctement chez les personnes autistes et, qu'en conséquence, la personne va avoir une perception très perturbée de son environnement et de son propre corps. Les enfants dont le système d’intégration sensorielle est déficient sont soit hypersensibles soit hypo sensibles aux stimuli.

De plus, cette sensibilité peut fluctuer, plus ou moins rapidement, ce qui lui demande une adaptation constante.

Les personnes hypersensibles vont développer des "défenses" sensorielles. Les personnes hypo sensibles, au contraire des hypersensibles, vont stimuler leurs sens. Leurs hypo ou hypersensibilité peuvent s’exprimer de manière variable. Parfois elles sont de faible intensité, parfois elles peuvent atteindre la santé de l’enfant ou encore l’entraver dans son développement ou ses apprentissages de manière significative.


Troubles du traitement sensoriel


En raison des difficultés qu’ils éprouvent à traiter l’information sensorielle, un certain nombre d’enfants ayant ce type de problèmes peut paraître emprunté et maladroit dans leurs activités quotidiennes. Les enfants dans ce cas deviennent submergés par un trop-plein d’informations sensorielles, car leur système nerveux perçoit les choses très rapidement ou intensément. Il leur semble que tout est trop bruyant, trop rapide ou trop brillant.

Hypersensibilité tactile / toucher


Ainsi l’enfant dont le système tactile transmet mal l’information aura une moindre capacité à bien tenir des objets dans la main. Ces enfants réagissent vivement à toute sensation tactile, comme par exemple les étiquettes des vêtements ou la texture des aliments, trop mous ou trop croquants, d’où le risque pour ces enfants de se montrer difficiles sur la nourriture.

Hypersensibilité visuelle


Toute sensation visuelle produit un effet de sur stimulation chez ces enfants. Ce peut être, par exemple, l’éclairage fluorescent ou intense ou les lieux où les stimuli visuels sont nombreux, comme les salles de classe, les centres commerciaux, les foires.

Hypersensibilité statique


Impression que les choses “vont trop vite” : Ces enfants ont tendance à ressentir les mouvements trop intensément, ce qui fait qu’ils sont souvent malades en voiture ou qu’ils ont peur de pratiquer des activités où l’un des pieds ne touche pas le sol. Ils ne monteront pas à une échelle ou dans un manège.

Hypersensibilité auditive


Ces enfants sont vivement incommodés par le bruit des appareils ménagers, d’une tondeuse à gazon, de l’autobus scolaire ainsi que par tout le bruit à l’intérieur d’une salle de classe ou d’une assemblée d’élèves. Souvent les enfants ayant une hypersensibilité auditive peuvent se mettre à faire eux-mêmes du bruit (par ex. leurs propres sons ou du bruit blanc) pour tenter de noyer tout autre bruit qui les dérange.

Hypo sensibilité sensorielle


Les enfants ayant une insuffisance de sensibilité sensorielle sont peu remuants et semblent passifs. Ils ne pas font l’effort d’obtenir une stimulation sensorielle et semblent accomplir leurs activités quotidiennes de façon léthargique et sans motivation. Ces enfants semblent avoir besoin de plus de stimuli sensoriels avant de pouvoir saisir l’information.

Communication et langage


Ils sont marqués par le défaut  ou l'absence  d'intention communicative verbale et non verbale, par des retards sévères et/ou l'acquisition de formes déviantes du langage.

La compréhension des modes de communication non verbale et verbale d'autrui est aussi limitée ; la compréhension des conversations abstraites, des mots dont la signification varie avec le contexte, de l'humour, n'est pas accessible à l'enfant autiste.

Les personnes autistes ont du mal à comprendre et à utiliser la communication non verbale. Ils ont du mal à établir le contact visuel avec les autres.

Ses capacités de communication sont altérées : le langage se développe très lentement ou pas du tout, les mots ne sont pas utilisés avec leur signification habituelle, les gestes se substituent aux mots, le phénomène d’écholalie  répétition du langage oral  se manifeste, présence d’un langage non fonctionnel ou répétitif et suivant un “script”.

Mauvaise coordination motrice


L'activité motrice spontanée peut être réduite  l'enfant n'a pas ou peu d'initiative motrice, est inerte, bouge peu  ou augmentée  l'enfant remue beaucoup, est sans cesse en mouvement . Des attitudes posturales inhabituelles, une démarche bizarre, peuvent être constatées. Son développement moteur est retardé et ses gestes sont maladroits, il peut être hyperactif.

Ces retards dans le développement de la motricité sont liés au système moteur central et ses médiateurs, y compris le cortex cérébral, le circuit frontal striatal, le cervelet, les régions impliquées dans la perception visuelle et le système d'intégration sensoriale-motrice.

Nombreux stéréotypies motrices  sans sens, sans objectif ou but concret et des mouvements répétitifs , ont une forte composante sensorielle, elles sont utilisés comme un stabilisateur ou régulateur, dans certains cas pour contrôler les hyper-stimules, dans d'autres  comme les dandinements  pour améliorer la sensation spatiale ou corporelle.

Les particularités sensorielles vestibulaires peuvent se retrouver dans la recherche ou l'évitement de certains déplacements, la recherche pour être en hauteur, des mises en danger en cherchant à être en équilibre ; certains comportements comme se jeter en arrière, se taper la tête, se balancer.

Audition


Les particularités sensorielles auditives peuvent entraîner des rejets des bruits du quotidien comme l'aspirateur, la tondeuse, les bruits de moteur, le téléphone, la sonnerie de la porte, le mixer, certaines voix ou encore les bruits de foule ou les ambiances sonores des magasins. Les enfants sont en général plus sensibles aux basses fréquences comme le bruit du réfrigérateur.

Les altérations auditives observées sont souvent à l’origine des premières interrogations des parents et constituent le premier motif de consultation puisque l’enfant ne réagit pas aux bruits très forts et ne répond pas à son prénom.

Il est impossible qu'un enfant autiste se concentre dans une classe où toutes sortes de bruit lui bombardent le cerveau comme un moteur à propulsion. La peur d'un bruit qui blesse les oreilles est souvent la cause de beaucoup de mauvais comportements et de crises de colère.

Ces anomalies peuvent exacerber les problèmes de communication et interférer avec les capacités linguistiques.

Vision


Les particularités sensorielles visuelles se retrouvent dans l'attrait pour les miroirs ou toutes surfaces réfléchissantes, les alignements d'objets, la fixation ou la fuite des spots lumineux, le jeux de lumière avec les rayons du soleil, la peur du noir, l’évitement du regard.

Par ailleurs, il est estimé qu'environ 30% des personnes autistes ont une photo sensibilité. Il y a des enfants qui ne supportent pas l’éclairage fluorescent, le scintillement (théoriquement imperceptible) les met hors de soi. Certains ne supportent pas la lumière intense, par exemple la lumière du soleil et expérimentent une vraie douleur à la vue des ces sources intenses de lumière.

L'établissement de connexions entre les yeux, le cerveau et le corps est défini dans l'ordre avant même la naissance et se développent durant les premières années de vie de l'enfant. Il se détermine la séquence du développement moteur de l'enfant avec la vision et les systèmes vestibulaires et proprioceptifs et en même temps, cette évolution permet à l'enfant développer correctement le reste de ses sens.

On pourrait dire que nous apprenons à utiliser notre vision en combinaison avec le mouvement. Dans les premiers jours de vie le bébé présente des mouvements de type réflexe, comme si ils étaient marquées par des empreintes génétiques. Au fur et à mesure que le bébé grandit il prend un plus grand contrôle de ses mouvements, c’est le système moteur qui tient les rênes et fortifie les aspects visuels. La vision accompagne ou suit le système moteur.

Il arrive un moment où la vision du bébé commence à prendre une plus grande importance, dans les premiers mois de vie c’est le système moteur qui a conduit le système visuel, mais entre 4 et 6 mois environ, l'enfant commence à utiliser sa vision plus efficacement et dirige ses mouvements, par exemple, pour atteindre les jouets qui pendent dans son berceau. L'instruction du mouvement a été dirigée par le système visuel.

Les aspects moteurs acquièrent un niveau plus élevé de développement, l'enfant renforce ses muscles et peut se déplacer avec facilité (se retourner, marcher à quatre pattes et enfin marcher), mais tous ces mouvements sont coordonnés et dirigés par le système visuel. Il s'agit d'un moment crucial, cela implique se situer dans l'espace.

Beaucoup d'enfants atteints d'autisme, surmontent, d'une manière très basique, cette étape, leur orientation spatiale associée à des problèmes moteurs est pauvre. Cette circonstance touchera par la suite de nombreux aspects fondamentaux du développement. Au fur et à mesure que l'enfant grandit il utilise son système visuel d'une manière très différente, en raison de ce dysfonctionnement sa façon d'utiliser la vision est conditionnée à d'innombrables aspects liés au développement.

Toucher


Les problèmes tactiles n'affectent pas seulement le bout des doigts. La peau est un organe tactile par excellence. Et la langue possède aussi une grande capacité tactile. Les stimuli tactiles peuvent être très extrêmes en cas d'hypersensibilité.

Cette hypersensibilité tactile peut compliquer des tâches simples et habituelles. Les enfants qui ont une hypersensibilité seront dans un état d'alerte très élevé, ce qui les conduira à des états forts d'anxiété.

C'est aussi fréquent chez les enfants hypo sensibles d’être hypo répondants au niveau proprioceptif. Ils ne sont pas capables de détecter dans l'espace une sensation tactile dans leurs corps. Il est normal que chez les enfants avec une faible réponse tactile leur réponse motrice soit faible aussi, y compris le contrôle de la force quand il s'agit de manipuler des objets. Cette maladresse peut se manifester de différentes manières, par exemple une lenteur quand il s'agit d'apprendre à s'habiller et se déshabiller.

Odorat et goût


Les enfants ayant des troubles olfactifs peuvent soit ignorer des odeurs fortes, tout sentir compulsivement, mettre dans la bouche des choses étranges – hypo-réactif , ou bien au contraire, éviter les odeurs et les aliments, les odeurs ordinaires leur causent des réactions de dégoût et ils ont tendance à être super-sélectifs avec la nourriture – hyper-réactifs . Et en ce qui concerne le goût c’est très semblable.

Cela comprend des niveaux d’hypo sensibilité qui font qu'ils prennent n’importe quoi dans leur bouche, ou des enfants qui ne supportent pas que leur sphère oro-faciale soit touchée.

Les particularités sensorielles olfactives ou gustatives peuvent jouer un rôle dans les difficultés alimentaires, concernant les différences de textures, de température, d’odeur ou de goût des aliments, le refus de certains produits d’hygiène ou encore l'odeur de certaines personnes.

Vestibulaire


Le système vestibulaire est situé dans l'oreille interne et il est responsable de l'équilibre et l'orientation spatiale. Notre cerveau utilise le système proprioceptif et vestibulaire pour traiter les effets de la dynamique  évolution dans le temps d'un système physique  et la cinématique  les lois du mouvement des corps , ce qui dans l’ensemble nous permet la coordination du mouvement en trois dimensions. Et il y a aussi une relation directe avec la vision, dans ce qu'on appelle le réflexe vestibo-oculaire (RVO). C’est un mouvement réflexe des globes oculaires, dans le sens inverse du mouvement de la tête, permettant une stabilisation du regard sur un point fixe.

La perception, le contrôle de l'orientation et des mouvements corporels n'est possible que grâce à la mise en relation de toutes les informations issues des récepteurs de l'oreille interne, des yeux, capteurs musculaires, articulaires et cutanés. C'est ainsi le système nerveux central qui centralise toutes ces informations et maintient le corps en équilibre.

Dans le cas de l'hyperréactivité vestibulaire l’enfant vit dans une sorte d'état d'alerte permanent.  Un problème dans la gestion de l'équilibre et le contrôle spatial peut entraîner l'enfant à marcher sur la pointe des pieds pour tenter d'être en mesure de se situer dans l'espace. Une mauvaise gestion du système proprioceptif, qui devrait régler nos actions motrices, produit une sensation étrange de marcher debout, et cette sensation désagréable est compensée en marchant sur la pointe des pieds.

Beaucoup d'enfants atteints d'autisme adorent le mouvement, se balancer, car ce mouvement produit une sensation agréable et stimulant pour l'enfant, c’est un exemple qu'il y a un dysfonctionnement de l'intégration sensorielle, liée à un problème avec le système proprioceptif et vestibulaire.

Les enfants avec une hypo réponse vestibulaire et proprioceptive montrent une forte activité motrice, une impulsivité qui, dans bien des cas, est confondue avec l'hyperactivité, et aussi en général l'enfant réalise des actions dangereuses dues au manque de sens du risque.

L'hypo et l’hyperréactivité vestibulaire compliquent le développement de l'enfant, provoquant des états d'anxiété, la peur, la vivacité d'esprit, qui de toute évidence entravent sa capacité d'apprentissage. Elles peuvent également provoquer un comportement impulsif, une sorte de besoin impérieux de réglementer et obtenir la réponse sensorielle dont l'enfant a besoin. Il y a une forte corrélation entre le vestibulaire, le visuel et le proprioceptif.

Proprioceptif


La proprioception désigne la perception, consciente ou non, de la position des différentes parties du corps. C'est la capacité de notre corps pour bien nous informer de notre position, la direction et le mouvement par rapport à notre propre corps. Elle participe activement à notre planification motrice et le schéma de notre corps. Le traitement adéquat de cette information nous permet que notre coordination motrice soit correcte. Elle fonctionne grâce à de nombreux récepteurs sensoriels situés dans l’oreille interne, les muscles et les tendons.

Les enfants atteints de somatodyspraxie ont un déficit dans le traitement des informations somato-sensorielles (tactile - proprioceptive) et des troubles fonctionnels liés à des difficultés dans l'accomplissement de tâches qui requièrent des actes motrices inusuels, tels que l'imitation des mouvements du corps, le sport, sauter à la corde l’écriture, des activités de construction, d’habillement et d'hygiène, l’utilisation des outils et ustensiles ; ne sachant pas quoi faire dans des situations sans instructions spécifiques. Tout cela va générer une série de problèmes qui affectent même l'écriture.

Les stéréotypies


Ce sont des actes que l'enfant répète indéfiniment. Elles peuvent être verbales, gestuelles, posturales... Les stéréotypies vocales sont fréquentes, l'enfant émet toujours le même son, avec la même intensité. C'est pour l'enfant un moyen de résister au changement.

L'enfant a souvent recours aux stéréotypies pour se défendre face à un apprentissage, à une nouvelle tâche, c'est pour lui une situation de confort. Elles permettent à l'enfant d'exprimer son émotion, son ennui, et fonctionnent à défaut du langage.

La plupart des stéréotypies exprimées par l’enfant présentant un autisme concernent des auto-stimulations sensorielles. La stéréotypie a souvent une fonction d’évacuation de stress, ou d’angoisse.

Quelques symptômes


Un enfant présentant un profil neuro-sensoriel altéré peut avoir un ou plusieurs symptômes.

* hypo ou hypersensible dans un champ sensoriel,
* des comportements de retrait, de frustration, ou d’agressivité inhabituels,
* facilement distrait,
* des difficultés à s’adapter aux situations nouvelles,
* se fatiguer vite,
* des troubles du langage,
* du retard dans les acquisitions motrices,
* des difficultés d’apprentissage,
* une mauvaise coordination des mouvements et un équilibre insuffisant.

Recherche


Une molécule pourrait réguler les troubles sensoriels

Des chercheurs de l'Inserm, dans une étude publiée dans la revue scientifique Nature Neuroscience en novembre 2014, expliquent avoir découvert un moyen de traiter l'anomalie des perceptions sensorielles dont souffrent les patients autistes.

Ils ont étudié chez des souris une autre maladie neuro-développementale : le Syndrome de l'X Fragile. Cette pathologie présente également des anomalies dans le traitement des informations sensorielles par le néocortex, la partie du cerveau responsable de la perception sensorielle. Dans ce cas, le néocortex de ces souris est hyper-excité au contact de stimulations sensorielles tactiles.

Les chercheurs ont trouvé que certains canaux ioniques  les molécules qui déterminent la façon dont les neurones traitent les signaux électriques  "déraillent" au sein du compartiment dendritique, une structure qui intègre les informations au sein des neurones.

Une molécule est parvenue à mimer un des canaux ioniques. Cela a permis de corriger l'hyperexcitabilité des neurones ainsi que les anomalies de l'intégration neuronale et l'hypersensibilité aux stimuli sensoriels.

Cette découverte faite sur la souris offre un nouvel espoir pour un traitement sur mesure des aspects sensoriels du Syndrome de l'X Fragile et des troubles du spectre autistique.


L'hypersensibilité sensorielle mieux comprise

Des chercheurs du Neuro-centre Magendie à Bordeaux (Inserm) dans une étude publiée dans Science Advances en novembre 2015, ont observé des différences dans les connexions neuronales, expliquant en partie la façon atypique dont les informations visuelles sont traitées par les personnes atteintes de troubles du spectre autistique.

Le cerveau des personnes atteintes de troubles du spectre autistique (TSA) présente une hyper-connexion de neurones à un niveau local dans certaines parties du cerveau. En revanche, une vue d'ensemble du cerveau montre que les différentes zones du cortex sont en partie déconnectées les unes des autres. Or les communications entre ces différentes zones cérébrales sont celles qui permettent d’intégrer des informations plus complexes provenant de parties du cerveau qui traitent souvent d’aspects différents.

Réorganisation neuronale des
connexions locales et à longue portée
 sur une souris modèle (à droite)
et sur une souris sauvage !à gauche)
De nouvelles données recueillies par les chercheurs permettent de mieux cerner ce qu'il se passe dans le cerveau d'individus atteints du syndrome de l'X fragile. Il s'agit d'une maladie génétique responsable de troubles du spectre autistique. L’étude se fonde sur des observations par IRM (imagerie par résonance magnétique) réalisées sur des souris modèles du syndrome de l'X fragile. Elle montre comment des connexions altérées entre différentes régions du cerveau sont impliquées dans les symptômes de ce trouble, et en particulier ceux d'ordre sensoriel.

Le néocortex est la zone étudiée par les chercheurs, notamment impliqué dans les perceptions sensorielles, les commandes motrices volontaires ou le raisonnement spatial.

Les chercheurs expliquent que l'ensemble des connexions cérébrales fonctionne comme une autoroute, permettant la distribution du trafic aux différentes parties d’une agglomération, mais également à d’autres villes et villages extérieurs. Mais dans le cas de l'X fragile, c'est un peu comme si les petites communautés étaient déconnectées les unes des autres faute d'autoroutes faisant le lien. Un maillage défaillant conduisant à une interprétation atypique des informations sensorielles : un traitement augmenté des détails fins ou des structures au détriment de l’image entière.

Transposés à l'homme, ces résultats pourraient permettre de changer la manière d’évaluer de nouvelles approches thérapeutiques pour traiter les personnes atteintes de l'X fragile ou de troubles du spectre autistique.


Altérations du cortex insulaire associées aux  troubles sensoriels de l'autisme

Des scientifiques de l'Université Harvard et l'Institut Max-Planck de neurobiologie à Martinsried, dans une étude publié dans la revue Neuron en juillet 2014, décrivent des altérations de molécules inhibitrices dans le traitement d'intégration du cortex insulaire dans des souris modèles génétiquement modifiés, directement associées aux troubles sensoriels de l’autisme.

Les scientifiques ont recherché des modifications de circuits neuronaux communs dans les souris modèles de l'autisme. Ils se sont concentrés sur le cortex insulaire, une structure du cerveau qui contribue à des fonctions sociales, émotionnelles et cognitives.

Le cortex insulaire d'un modèle d'autisme de la souris
 est déjà si fortement activé par une modalité sensorielle
 unique (ici un son), qu'il est incapable de remplir son rôle dans
 l'intégration des informations provenant de sources multiples
Le cortex insulaire des souris saines intègre des stimuli de différentes modalités sensorielles et réagit plus fortement lorsque deux stimuli différents sont présentés de façon concomitante (par exemple, un son et une touche). Cette capacité de combiner des stimuli sensoriels a été systématiquement affectée dans tous les modèles de l'autisme. Fait intéressant, souvent un seul sens a suscité une telle réaction forte que l'ajout d'un deuxième stimule n'a pas ajouté plus d'informations.

Ce est très semblable à la réminiscence de l'hyperréactivité sensorielle vécue par de nombreux patients autistes. Les scientifiques ont découvert en outre que le cortex insulaire des souris modèles adultes ressemblait aux schémas d'activation observés chez les souris de contrôle (non autistes) très jeunes, comme si le cortex insulaire des souris autistes n'aurait pas bien mûri après la naissance.

Ces résultats suggèrent que le déséquilibre entre excitation et inhibition peut être un facteur important dans la neuro-pathologie de l'autisme. Cependant, les thérapies futures devront être soigneusement adaptés à chaque sous-groupe particulier de l'autisme.


Son et image coïncident mal dans le cerveau des autistes

Une étude menée à l'université de Vanderbilt (Tennessee) et publiée dans la revue Journal of Neurosciences en janvier  2014, suggère que les déficits de langage et de communication des enfants autistes seraient liés à une mauvaise capacité à intégrer des informations auditives et visuelles.

Pour arriver à ces conclusions, les chercheurs ont demandé à des enfants autistes, dits de haut niveau (c'est-à-dire sans déficience intellectuelle), âgés de 6 à 18 ans de réaliser certaines tâches mobilisant simultanément l'audition et la vision.

Les participants à l'étude ont travaillé à travers un ensemble de tâches différentes. Les chercheurs ont utilisé différents types de stimulus visuel, comme de simples étincelles et des sons ; des stimuli environnementaux plus complexes, comme un marteau frappant un clou et des stimuli de langage. Et on a demandé aux participants de dire si les événements visuels et auditifs ont eu lieu en même temps.

L'étude a révélé que les enfants atteints d'autisme ont une hypertrophie dans une région connue comme la fenêtre de l'union temporaire, c'est-à-dire le cerveau présente des problèmes pour associer des événements auditifs et visuels qui se produisent dans un certain laps de temps.

Les enfants atteints d'autisme ont des difficultés à traiter l'entrée simultanée par les canaux audio et visuels. C'est-à-dire ils rencontrent des problèmes pour intégrer l'information simultanée de leurs yeux et oreilles.

Dans une deuxième partie de l'étude, les scientifiques ont découvert que les enfants autistes démontrent aussi des faiblesses quant à la force de consolidation ou association des stimuli du langage audiovisuel. Une des images classiques des enfants autistes est qu'ils mettent leurs mains sur leurs oreilles. Il y a une situation d'une mauvaise “syntonisation” des différents canaux sensoriels, générant donc un traitement erroné de ces informations.

Les résultats montrent que, chez ces enfants, il existe un délai entre le traitement de l'information vue et celle qui est entendue. Cette difficulté à intégrer son et image pourrait avoir des conséquences importantes sur les capacités de communication des enfants et leurs interactions sociales.

Le traitement des différents types d'information que notre cerveau reçoit en permanence de l'extérieur se fait dans des régions corticales différentes. Une bonne intégration nécessite que la communication cérébrale soit efficace.

Il a récemment été montré que les connexions dans le cerveau des patients autistes seraient supérieures à celles d'enfants sans TSA, mais uniquement à l'échelle locale. Les connexions dites de longue distance, c'est-à-dire entre régions éloignées, seraient, elles, moins efficaces. Une différence qui pourrait expliquer les perturbations sensorielles décrites.


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Thérapie d’intégration sensorielle

L’intégration sensorielle se réfère au processus neurologique impliquant la réception, la modulation et l’intégration des informations sensorielles. Le système nerveux transforme les sensations en perceptions en organisant les informations sensorielles provenant du corps et de l’environnement (fournies par les différents systèmes sensoriels : tactile, auditif, visuel, gustatif/olfactif, vestibulaire, proprioceptif) afin d’utiliser efficacement le corps.

La thérapie d’intégration neurosensorielle est une intervention focalisée sur les réponses sensorielles dysharmoniques exprimées par des enfants présentant des troubles du développement et l’accompagnement à leur régulation.

Le développement harmonieux du jeune enfant est fortement dépendant de ce processus neuro-développemental. L’intégration neurosensorielle se développe de manière naturelle et adaptée pour la plupart des individus. Cependant, pour certaines personnes, le développement de la planification ou la coordination motrice ou encore l’adaptation aux stimuli de l’environnement ne va pas de soi.

Langage de signes versus système de communication augmentatif et alternatif (CAA)


Les langages des signes désignent les langues gestuelles produites par les mouvements des mains, du visage et du corps dans son ensemble. Les techniques d’interventions focalisées dans le langage visent à améliorer le langage oral de l’enfant en utilisant plusieurs canaux comme le geste, le symbole visuel, l’écrit…

À gauche: langage des signes
À droite: Picture Exchange Communication System
La communication améliorée et alternative devrait être définie comme un système comprenant quatre éléments principaux : les symboles, les aides, les stratégies et les techniques.

Elle ne désigne pas seulement plusieurs modes ou systèmes de communication non orale, mais aussi une gamme de stratégies et de techniques d'intervention dans le but de permettre une communication efficace au moyen de symboles et d'aides. Son but étant de soutenir les enfants dans le développement de compétences en communication efficace et d'aptitudes scolaires.

Plusieurs auteurs expliquent que la difficulté des enfants atteints d'autisme à apprendre le langage gestuel est en raison de problèmes moteurs. L'utilisation de CAA favorise un développement beaucoup plus riche et facile de la communication fonctionnelle et du développement du langage et le discours.

Le langage des signes n'est pas une intervention appropriée pour relancer le développement de la communication et l'utilisation de CAA est beaucoup plus appropriée et efficace.


Modèles neuro-moteurs


PROMPT  for Restructuring Oral Muscular Phonetic Targets (restructuration de cibles phonétiques musculaires orales) est une technique qui intègre des principes neuro-moteurs, des informations kinesthésique et proprioceptive, ainsi que des informations auditives et visuelles.

En plus de la manipulation de structures de production sonore, PROMPT attache beaucoup d'importance au mouvement du corps et à la stabilité.

Une session typique comprend des activités basées sur le jeu ou d'origine naturelle qui peut encourager les initiations d'interaction de l'enfant. Ces manipulations comprennent le toucher, la pression, des emplacements spécifiques, ainsi que la sensibilisation auditive et visuelle pour promouvoir l'intégration structurelle au sein de l'appareil vocal de l'enfant.

Auditory-Motor Mapping. C’est une forme d’intervention pour faciliter la sortie vocale en non-verbale. La formation de la cartographie auditive-moteur (AMMT) utilise les forces musicales des enfants autistes pour se concentrer sur les compétences de la parole. Il contribue à développer la parole par la formation de l'enfant à associer des sons avec des actions motrices utilisées pour la communication.

Le système est basé sur la combinaison d'une certaine intonation, accompagnée par le son d'une paire de tambours, cette forme facilite le mappage audio-moteur. C'est très semblable au système utilisé pour les bébés pour la création de statistiques et les modèles de langage. Le thérapeute introduit des mots ou des phrases sous forme de chanson pendant qu'il joue les tambours en forme rythmique. Cet acte est très structuré et répétitif. Cette réponse positive est liée à l'intérêt et la qualité d’empathie de l'enfant atteint d'autisme vers la musique et fait de la thérapie quelque chose de plaisant pour l'enfant.

Le binôme chant-percussion active des régions du cerveau impliquées dans les aspects visuel, auditif, moteur et des représentations mentales de telles actions. Cette implication affecte le lobe temporal, les régions frontale, postérieure et médiane, qui sont vraisemblablement celles liées aux neurones miroirs. La région fronto-pariétale est liée à la partie motrice, qui, selon la théorie des neurones miroirs, est activée non seulement lorsque nous exécutons l'action, mais quand nous la voyons ou entendons.


Stimulation électromagnétique


Deux techniques différentes sont analysées : Transcranial Direct Current Stimulation (tDCS) et Transcranial Magnetic Stimulation (TMS).

La stimulation transcrânienne par courant direct ou tDCS, est une stimulation cérébrale non invasive. Cette technique consiste à manipuler les fonctions cérébrales et peut être utilisée pour améliorer les déficits langagiers.

La stimulation magnétique transcrânienne ou TMS, est une technique médicale utilisée dans le diagnostic et dans le traitement de certaines affections psychiatriques et neurologiques.

Ce sont des techniques non invasives. Un courant électrique intracrânien de faible intensité est appliqué sur le cortex cérébral. Ces méthodes sont relativement nouvelles et sont encore en phase d'expérimentation. Les deux techniques à petits essais ont rapporté des résultats positifs, même s'il est important de noter qu'elles semblent seulement être efficaces dans l'autisme de haut niveau et l'Asperger.


Interventions dirigées à des activités de synchronisation  motrice


Ces méthodes sont axées sur l'intervention des modèles de jeux dirigés. Les objectifs sont destinés à la communication, les activités sociales, l’interaction avec les pairs et le développement du langage.

La recherche approfondie et à grande échelle a montré que ces interventions peuvent améliorer les compétences du langage et de la communication spontanées et généralisées, améliorer les conditions sociales et les compétences de jeux, réduire les comportements inappropriés et améliorer la motivation et la performance académique.

Early Start Denver Model (ESDM)


Le “Early Start Denver Model” (ESDM) est un programme élaboré spécifiquement pour l’intervention auprès d’enfants atteints d’autisme âgés de 12 à 48 mois (le programme peut toutefois être utilisé jusqu’à l’âge maximal de 60 mois).

Tous les domaines du développement de l’enfant font l’objet d’une évaluation et d’une intervention : communication (réceptive et expressive), compétences sociales, imitation, jeu, cognition, motricité (fine et globale) et autonomie. Une évaluation régulière des compétences de l’enfant est effectuée, toutes les 12 semaines, à l’aide de la “Curriculum Checklist”.

Le jeu et l’affect positif sont au cœur de l’intervention. L’intervenant suit la motivation et les intérêts de l’enfant, c’est donc ce dernier qui effectue le choix des activités. Le travail de l’intervenant est alors d’insérer, au sein du jeu de l’enfant, un apprentissage des compétences déterminées par les objectifs. Le jeu est rythmé par une succession de tours de rôles entre l’intervenant et l’enfant, aussi bien dans l’imitation que dans l’élaboration de l’activité. Les interactions sociales sont continuellement sollicitées.

L’entraînement par imitation réciproque


C’est une intervention focalisée sur les interactions sociales passant par l’imitationDans l’approche de l’entraînement par imitation réciproque, on travaille avec l’enfant sur une imitation spontanée via des jeux symboliques rappelant la vie quotidienne, des comptines et des échanges entre pairs.

L’entraînement par imitation réciproque cherche à généraliser les compétences d’imitation spontanée des jeunes enfants dans des situations de jeu courantes centrées sur le développement des interactions sociales.

La capacité d’imitation sous-entend un certain nombre de compétences cognitives et une sollicitation importante des fonctions exécutives. L’imitation permet d’apprendre de nouveaux gestes ou comportements en reproduisant ce qu’ils voient.

Dans l’ESDM, tout comme dans la méthode PRT (Pivotal Response Training), les intérêts de l’enfant guident les séances, les tentatives de communication et de participation aux activités sont renforcées même lorsqu’elles n’aboutissent pas et les compétences acquises sont continuellement sollicitées dans le but d’assurer leur maintien. C’est aussi par l’imitation que le jeune enfant développe son langage et sa communication.


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