L’enfance est une période au cours de laquelle le cerveau subit des changements importants. Les différentes zones du cerveau se développent selon des trajectoires individuelles, en grossissant et en diminuant de taille avec le temps. Par exemple, le volume de la matière grise corticale atteint habituellement un pic pendant l’adolescence, tandis que celui de la matière blanche augmente de façon linéaire pendant la même période.
L’âge auquel le pic est le plus épais varie à
travers le cortex, vient en premier la maturation des zones corticales impliquées dans les fonctions primaires, comme
les systèmes moteur et sensoriel, et en dernier la maturation des aires
associatives d’ordre supérieur, comme le cortex
préfrontal.
C’est très important de comprendre comment le
développement et la fonction du cerveau influent sur la santé physique et
mentale le long du cycle de vie. Pour comprendre ces relations, il devient
nécessaire connaître comment les neurones se développent
et interagissent entre eux et comment, dans toutes les périodes de la vie,
l'expérience influe sur ces processus.
Le développement des neurones implique
l'activation de gènes et la stimulation des connexions synaptiques entre les
cellules nerveuses (formation synaptique).
Longtemps, les scientifiques ont cru que le
cerveau, une fois mature, se caractérisait par la stabilité de ses connexions,
jugées immuables. Grâce à la plasticité cérébrale, le cerveau modifie
l'organisation de ses réseaux de neurones en fonction des expériences vécues
par l'organisme.
Dès la dix-huitième semaine de la grossesse, la
plupart de nos 100 milliards de neurones, dont une fraction importante va
mourir, principalement durant la période fœtale, sont constitués et ont trouvé
leur destination.
Traits d'union entre ceux-ci, les connexions
synaptiques prolifèrent alors de façon exubérante. Sous l'influence des
expériences vécues par l'enfant in utero et pendant ses premières années
de vie, nombre d'entre elles, redondantes ou “non pertinentes”, vont être
éliminées, tandis que d'autres vont se consolider.
Beaucoup d'exemples existent de comment
l'expérience, à un âge précoce, influe sur le développement des voies du
cerveau, qui affecteront le comportement dans la vie adulte. Par exemple, si on
apprend à nager, à jouer au tennis, ou à skier quand on est très jeune, la performance
sera bien meilleure que si l’on apprend à nager, à jouer au tennis, ou à skier à
l'âge adulte. Cela suggère que la plasticité du cerveau concernant les
fonctions nécessaires pour pratiquer ce sport est plus dynamique quand on est
jeune, celles-ci diminuent à mesure que l'on vieillit. Une observation
intéressante est de constater comment l'accent des individus reste fixé quand ils parlent
dans les premières années de la vie. L'expérience à un âge précoce, quand le
cerveau est très plastique, influe sur le développement des voies de celui-ci
et affecte le langage et autres fonctions dans la vie adulte. L'un des points
importants à remarquer dans le travail sur le développement du cerveau basé sur
l'expérience, se réfère à ce que beaucoup de voies formées pendant l’âge
précoce de la vie, sont souvent difficiles de développer et de changer dans la
vie adulte.
La majorité d’enseignants de l‘école primaire des
pays développés reconnaissent que les enfants qui ont des difficultés pour
l'apprentissage, quand ils entrent dans le système scolaire, tendent à rester
derrière le reste de leur cohorte, à mesure qu'ils avancent d'un degré à
l’autre.
Une période critique dans le développement du cerveau
Les milliards de neurones qui se trouvent dans le
cerveau d’un individu ont tous le même code génétique (ADN). C'est
l’épigénétique qui est responsable de la différenciation des fonctions
neuronales – la vue, l’ouïe, le toucher, le comportement –.
L’épigénétique est le processus moléculaire et
cellulaire qui gouverne la fonction des gènes. Les effets de l’épigénétique sur
la fonction des gènes commencent dès la conception et se poursuivent pendant le
développement intra-utérin et après la naissance.
L'une des controverses importantes des neurosciences
d'aujourd'hui est celle de savoir s'il y a des périodes critiques dans le
développement du cerveau. Le concept de période critique vient, en partie, de
l'histoire de la vision. Cependant, les parties du cerveau en rapport à l'odeur
et à la mémoire peuvent former de nouveaux neurones le long de la vie adulte.
Dans le cas de la mémoire, cela est certainement important, puisque nous devons
continuellement façonner de nouveaux souvenirs au long de la vie. Bien que la
régénération des neurones soit une évidence, cela ne s’accorde pas facilement
avec l'évidence d'une période critique, née des études des voies impliquées
dans la vision et l'audition. Évidemment, un défi important est de bien comprendre
la période critique de développement du cerveau et sa capacité à se régénérer
dans ses différentes parties.
Les périodes
critiques ou sensibles,
sont des périodes de temps pendant lesquelles le système nerveux est plus
réactif à certaines stimulations de l’environnement, lui permettant de
connecter plus particulièrement certains neurones entre eux. Leur durée est
variable, et ces périodes ont des objectifs de développement spécifiques. C’est
à partir de cela que l’apprentissage peut se faire. Cette notion est à mettre
en lien avec la plasticité neuronale qui est à la base de l’adaptation du
cerveau.
Les voies sensorielles
Les expériences qui agissent sur le développement
du cerveau par l’intermédiaire des voies sensorielles comprennent les
perceptions auditives, tactiles, visuelles et olfactives, la nourriture, les
pensées, les drogues, les blessures, les maladies et d’autres facteurs.
Comment les cellules des parties distinctes du
corps humain (avec la même information génétique) se distinguent-elles pour remplir
ses fonctions spéciales ? Dans le cas du cerveau, il y a des milliers de
millions de cellules nerveuses avec la même information génétique. Cependant, pendant
le développement précoce, elles se distinguent pour assumer de différentes
fonctions, comme la vision, l'ouïe, le toucher, le langage, la cognition, les
réponses émotives et les voies de stress. Maintenant, nous savons que
l'expérience pendant la vie précoce influence les voies génétiques dans les
neurones branchés sur des voies sensorielles comme la vision, choisies alors
pour se distinguer et pour fonctionner comme neurones de la vision.
Hubel et Weisel étaient déconcertés par le fait que
des enfants nés avec des cataractes n'aient pas développé une vision normale, une
fois les cataractes remuées dans une phase plus tardive de leur développement.
Ils savaient que les adultes qui développent des cataractes, une fois opérés de
celles-ci, récupèrent la vision normale. Leur travail et celui de quelques
hommes de science sur ce domaine, ont montré que si les signaux de l'œil
atteignent les neurones de l'écorce occipitale dans une étape précoce, ceux-ci
se distingueront et se réuniront pour devenir les neurones de la vision. La
machinerie génétique de ces cellules se 'allume' quand il y a une stimulation
visuelle de l'œil, pour les transformer en neurones de la vision. Les adultes
qui développent les cataractes auront déjà des neurones de la vision et c'est
pourquoi quand ils s'opèrent des cataractes, la vision est restaurée. Les
enfants avec les cataractes qui n'ont pas été traitées pendant les deux premières
années de vie, auront des difficultés à reconnaître les visages quand celles-ci
seront opérées.
Nous savons que les neurones de la partie du
cerveau – le cortex temporel –responsable d'interpréter les signaux de l'ouïe,
se développent aussi sur la base d'un modèle similaire à celui des neurones du cortex
visuel. Le développement de cette voie est important pour le développement du
langage. Les enfants naissent avec l'habileté de comprendre les sons dans toute
langue. Aux environs de six mois les enfants perdent l'habileté de connaître
facilement les sons de différentes langues. Les enfants peuvent facilement
apprendre une deuxième langue entre 0 et 5 ans. Cela devient plus difficile à
l'âge de 10. Dans le cas de l'audition et le développement du langage, il y a
clairement une période critique.
Le langage et la lecture sont influencés par les
circonstances de la vie à un âge précoce. Dans un entourage normal, les enfants
développent l'habileté du langage et de la lecture. Nous savons aussi que si l’enfant,
entre l'âge de 1 à 3 ans, est exposé aux interactions verbales, cela détermine
son habileté verbale et sa performance dans le système scolaire à l'âge de 9.
Le toucher est une voie sensorielle qui – contrairement
aux systèmes sensoriels spécifiques comme l'odeur, la vision, et le son – se
nourrit de toutes les régions de la peau. L'endroit d'interprétation primaire
dans le cerveau est le cortex sensoriel. Le développement des voies du toucher
commence dans l'utérus et, en ce qui concerne le développement, il semble
suivre ce que nous savons sur l'audition et la vision, bien que ces voies
soient moins définies.
La fin des périodes critiques du développement ne
sonne évidemment pas le glas de la plasticité cérébrale, mais elle réduit
l'intensité de ses manifestations. L'enfant doit tout apprendre (marcher,
parler...), il est vrai, alors que l'adulte jouit déjà de nombreux acquis.
L'un des développements les plus importants pendant
les premières années est celui des connexions synaptiques entre les neurones
dans les différentes parties du cerveau, ce qui rend possible que celui-ci
réalise ses fonctions. Maintenant nous avons déjà des descriptions de la
formation de ces connexions synaptiques dans les différentes phases de
développement de l'enfance. Les travaux de Huttenlocher montrent que la densité
des connexions à l'âge de 6 ans est beaucoup plus grande qu'à la naissance. Cela
n'est pas surprenant, puisque la réponse du cerveau à l'expérience mène au
développement des fonctions plus complexes comme le langage, la cognition, le
comportement et la coordination des voies du mouvement moteur, dans cette
période précoce de la vie. Dans cette analyse il est intéressant de voir que vers
l'âge de 14 ans, les connexions synaptiques semblent être moins denses qu'à
l'âge de six. Cela a éveillé l'intérêt de comprendre comment les connexions des
neurones changent pendant le développement et pourquoi certaines disparaissent.
L'explication consiste en ce que les connexions nerveuses sont éliminées si les
voies sont peu utilisées. L'intensité de leur utilisation a un plus grand effet
dans la force et la durabilité des connexions synaptiques.
Le développement affectif, social et physique des enfants en bas âge a un impact direct sur leur développement et sur l'adulte qu’ils deviendront.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire