L’ensemble de la population générale est exposé quotidiennement à différents niveaux de produits contaminants. Bien que tout le monde soit concerné par les contaminants, les enfants y sont plus particulièrement vulnérables puisque ceux-ci sont exposés aux toxines dès la conception.
La neurotoxicité développementale ou toxicité du
cerveau en développement de l’enfant a des conséquences en termes d’émergence
de l’autisme, du trouble d’hyperactivité avec déficit d’attention, de la
dyslexie et d’autres troubles cognitifs, des troubles qui affectent aujourd’hui
des millions d’enfants à travers le monde. Ce sont des produits chimiques
industriels qui blessent le cerveau en développement, pour certains identifiés,
pour d’autres restant à identifier.
Les études ont montré que certains produits
chimiques passent la barrière hémato-encéphalique et entraînent des symptômes
neurologiques. Chez les enfants au cerveau encore en développement ou in utero, ces produits chimiques sont
extrêmement toxiques, car ils touchent le cerveau en période de vulnérabilité
extrême. Les effets sont irréversibles.
Substances neurotoxiques
Les contaminants environnementaux sont définis comme des substances qui sont introduites, de façon accidentelle ou délibérée, dans l’environnement et qui peuvent nuire à la flore, la faune ainsi qu’à l’humain. Ils se retrouvent dans le sol, dans l’air, dans l’eau ainsi que dans les aliments et certains autres produits de consommation, et peuvent pénétrer l’organisme par différentes voies, telles que l’absorption cutanée, l’ingestion et l’inhalation.
Outre les organochlorés, les métaux lourds
demeurent aussi préoccupants car leurs concentrations dans plusieurs régions du
monde augmentent plutôt que de diminuer.
Les pesticides sont des polluants qui peuvent agir
comme des perturbateurs endocriniens ou comme des neurotoxiques.
Les pesticides ont la capacité de contribuer à des
troubles du développement neurologique, mais on commence seulement à rassembler
des données sur leur toxicité chronique.
Les troubles du développement
Les troubles du développement, y compris l’autisme
et les troubles de l’attention sont répandus et affectent des millions
d’enfants nés chaque année. Les causes sont en grande partie inconnues, mais on
sait que l’exposition au plomb, au mercure, aux PCB, aux certains pesticides et
autres neurotoxines environnementales contribue au problème.
De nombreuses dysfonctions neurologiques ont été
identifiées chez les enfants nés de mères exposées durant la grossesse incluant
un retard mental, des problèmes psychomoteurs, de l’ataxie cérébrale et des
convulsions, des troubles neuropsychiatriques, notamment des troubles du
sommeil, des problèmes d’anorexie ainsi que des comportements d’irritabilité,
d’anxiété et d’agressivité.
Les principales fonctions touchées sont
l’attention, la mémoire, l’apprentissage et le langage.
L’exposition postnatale pendant l’enfance peut
aussi nuire au développement des capacités cognitives et neuropsychologiques. Les
concentrations sanguines de ces toxines ont été associées à un quotient
intellectuel inférieur, à des déficits d’attention spatiale et à des
dysfonctions exécutives pouvant compromettre la performance académique des
enfants. Des déficits comportementaux tels que l’inattention et l’impulsivité
ont également été rapportés. Ainsi, les habiletés verbales telles que le
vocabulaire et la lecture semblent particulièrement affectées. Plus
précisément, une relation significative a été trouvée entre leur exposition et
l’obtention d’un diagnostic du trouble déficitaire de l’attention avec
hyperactivité chez des enfants âgés de 4 à 15 ans.
Vulnérabilité des enfants
L’environnement auquel les enfants sont confrontés
aujourd’hui inclut des dangers inconnus ou insoupçonnés il y a quelques
décennies. Ils sont exposés aux risques de plus de 85.000 produits chimiques
synthétiques, dont la plupart ont été mis au point depuis la seconde guerre
mondiale.
Ces produits chimiques se trouvent le plus souvent
dans la nourriture, les produits pour la maison et les pesticides mais
seulement 43% ont fait l’objet de tests pour leur toxicité potentielle contre
les humains, selon un rapport de l’Académie nationale des sciences (NAS). Et
bien que l’on sache maintenant que les enfants sont particulièrement vulnérables
aux produits chimiques dans l’environnement, seuls 7% de ces produits chimiques
ont été étudiés pour évaluer leur toxicité potentielle pour les enfants.
Les enfants sont exposés de façon disproportionnée
aux produits toxiques dans l’environnement. En proportion de poids, les enfants
boivent plus d’eau, mangent plus de nourriture et respirent plus d’air que les
adultes. Ainsi les enfants sont nettement plus exposés aux produits toxiques
dans l’eau, la nourriture et l’air. Deux facteurs supplémentaires qui
augmentent encore l’exposition des enfants sont leurs tendances naturelles à
manger à la main et leurs jeux plus près du sol.
L’exposition prénatale est directement dépendante
de l’exposition maternelle. Les contaminants qui se retrouvent dans l’organisme
de la mère traversent la barrière placentaire pour ensuite atteindre le fœtus.
Durant la période gestationnelle, certains contaminants qui s’étaient accumulés
dans la matière osseuse de la mère, notamment certains métaux lourds, sont
libérés dans sa circulation sanguine. Il est maintenant établi que l’exposition
in utero peut causer des déficits chez l’enfant même lorsque la mère est
asymptomatique durant la grossesse, indiquant une plus grande vulnérabilité du
fœtus. Après la naissance, plusieurs contaminants auxquels la mère est exposée
peuvent se transférer au bébé par l’allaitement.
Les passages métaboliques des enfants, en
particulier durant les premiers mois après la naissance, sont immatures. La
capacité des enfants à détoxifier et expulser les agents polluants est
différente de celle des adultes. Dans de nombreux cas, les enfants sont moins
capables que les adultes de gérer des produits toxiques.
Les enfants connaissent une croissance et un
développement rapides, et ces processus sont facilement
perturbés. Durant la vie de l’embryon et du fœtus ainsi que les premières
années après la naissance, le cerveau d’un enfant, le système endocrinien, les
organes reproducteurs, le système immunitaire et les organes respiratoires
connaissent une croissance, un développement et une différentiation rapides. Si
ces processus de développement sont perturbés par le plomb, le mercure, les
solvants, les agents perturbateurs de l’endocrine et autres produits
environnementaux il y a un fort risque de perturbation et cette perturbation
est souvent irréversible.
Autisme
Désormais il y a suffisamment de preuves qui
pointent vers le fait que les pesticides agricoles – parmi d’autres toxines
environnementales – pourraient jouer un rôle important dans l’augmentation
rapide du taux d’autisme au cours des dernières décennies.
Les produits chimiques soupçonnés d’endommager le
cerveau et causer des traits autistiques comprennent :
Phtalates. Composé chimique avec du pétrole de longue
durée utilisé pour améliorer ou accroître la flexibilité et la durabilité des
matières plastiques. Une de ses utilisations les plus courantes est la
transformation des matières plastiques dures en plastique souple, utilisé en
grande partie dans la formule de cosmétiques et de produits de beauté et d’hygiène
personnelle afin que le parfum reste imprégné dans les produits.
Bisphénol A. Il se trouve dans les revêtements de
boîtes de nourriture, retardateurs de flammes bromés (présents dans les vieux
ordinateurs, les téléviseurs et le rembourrage de mousse), solvants chlorés
(utilisés dans l’industrie), le pesticide DDT et les pesticides
organophosphorés.
Une autre preuve d’un lien entre ces produits chimiques
environnementaux et le trouble du spectre autiste est montrée dans les produits
chimiques pris pendant la grossesse, y compris la thalidomide, l’acide
valproïque (médicament anticonvulsivant) et le misoprostol. Un lien a été aussi
trouvé entre l’exposition prénatale à ces chlorpyriphos (organophosphate pesticide) et un risque accru de troubles généralisés du
développement.
Lien entre grossesse, pesticides et autisme
D'après une étude de chercheurs de l'université
Davis, Californie, publiée dans le journal Environmental Health Perspectives
en juin 2014, une femme enceinte qui vit près d'une ferme utilisant ces produits
chimiques a un risque 66% plus élevé de voir son enfant développer la maladie.
Les chercheurs ont confronté des données sur les
utilisations de pesticides en Californie aux adresses de 1000 personnes. La loi
en Californie requiert de préciser les types de pesticides pulvérisés, où,
quand et dans quelles quantités. Ils ont
constaté que plusieurs types de pesticides ont été plus couramment utilisés
près des habitations où les enfants ont développé le syndrome de l'autisme ou
ont eu des retards de développement. Environ un tiers des participants à
l'étude vivaient dans un rayon de 1,25 à 1,75 kilomètre de l'endroit où les
pesticides ont été utilisés.
Cette étude menée par le Mind Institute porte sur
des familles avec des enfants âgés de 2 à 5 ans diagnostiqués avec l’autisme ou
un retard de développement. Les chercheurs ont cartographié les lieux de vie,
pendant la grossesse et au moment de la naissance.
L’analyse constate qu’un tiers des participants à
l’étude vivait à proximité de sites d’application de pesticides. L’association
entre l’exposition aux pesticides et le risque d’autisme est dépendante de
cette proximité, et le risque d’avoir un enfant autiste augmente chez les mères
vivant à proximité directe de ces sites. Les organophosphates sont associés à
un risque élevé de troubles du spectre autistique, en particulier au cours du
second trimestre de grossesse. Les pyréthrinoïdes sont également associés, mais
plus modérément à des TSA, en particulier en cas d’exposition juste avant la
conception et pendant le troisième trimestre de grossesse. Les carbamates sont
associés à un retard de développement.
Les pesticides affectent la neurotransmission. Si certains sous-groupes semblent plus
vulnérables à l’exposition à ces composés le message est très clair : les
femmes enceintes doivent prendre des précautions spécifiques pour éviter tout
contact avec des produits chimiques agricoles. Les résultats confirment que ces
pesticides couramment utilisés sont neurotoxiques et constituent une menace
neurotoxique, donc des retards de développement ou un risque d’autisme. L’explication
est toujours la même, les synapses se développent dès le début de la grossesse,
et les pesticides affectent leur développement et donc la neurotransmission.
Les chercheurs ont découvert que les risques
d'autisme étaient d'autant plus élevés que le contact avec les pesticides se
faisait au deuxième et au troisième trimestre de la grossesse. Le développement
du cerveau du fœtus pourrait être particulièrement sensible aux pesticides.
Cette étude valide les
résultats d'une recherche précédente qui avait constaté des liens entre le fait
d'avoir un enfant autiste et l'exposition, pendant la grossesse, à des produits
chimiques de l'agriculture en Californie. Le message est très clair :
les femmes enceintes doivent faire attention à éviter tout contact avec les
produits chimiques de l'agriculture.
Alimentation
versus exposition. La recherche a aussi souligné l’importance de la
nutrition de la mère pendant la grossesse, en particulier l’utilisation des
vitamines prénatales pour réduire le risque d’avoir un enfant avec autisme.
L’étude est intéressante et ses résultats sont
parfaitement transférables vers n’importe quel pays où les pesticides sont
utilisés pour assurer le développement des cultures.
Des produits chimiques affectent le développement neurologique
Une étude réalisée par
des chercheurs de la Harvard School of Public Health et l’École de médecine du
Mont Sinaï, publiée dans la revue médicale The Lancet Neurology en février 2014, insiste sur l’urgence et
l’enjeu de développer une nouvelle stratégie globale de prévention afin de
contrôler l'utilisation de ces substances.
Des produits chimiques
pourraient être à l'origine de la hausse récemment constatée des troubles du
développement chez l'enfant, préviennent des chercheurs américains.
L’autisme, le trouble du déficit de l'attention
avec hyperactivité (TDAH), la dyslexie et d'autres troubles cognitifs,
affectent des millions d'enfants à travers le monde, et certains diagnostics
semblent augmenter en fréquence. Les produits chimiques industriels qui blessent
le cerveau en développement sont parmi les causes connues de cette augmentation
de la prévalence.
Dès 2006, de nombreux chercheurs avaient
identifiés les produits chimiques industriels neurotoxiques en cause, dont le
plomb, le méthylmercure, les polychlorobiphényles, l'arsenic et le toluène.
Dès cette annonce, des études épidémiologiques ont
mis en évidence six développements neurotoxiques : le manganèse, le
fluorure, le chlorpyriphos-éthyl, le dichlorodiphényltrichloroéthane (DDT,
pesticides), le tétrachloroéthylène (solvant), et les polybromodiphényléthers (PBDE,
retardateurs de flamme).
Cependant, les chercheurs annoncent dans cette
nouvelle étude que beaucoup plus de neurotoxiques restent à découvrir. Pour
contrôler la pandémie de la neurotoxicité développementale, les chercheurs
proposent une stratégie globale de prévention.
Les produits chimiques non testés ne doivent pas
être présumés sans danger pour le développement du cerveau, et des produits
chimiques dans l'utilisation existante et tous les nouveaux produits chimiques
doivent être testés pour la neurotoxicité développementale.
Afin de coordonner ces efforts et d’accélérer le
transfert de la science en matière de prévention, les chercheurs proposent la
formation urgente d'un nouveau centre d'échange international.
La plus grande préoccupation est le grand nombre
d'enfants qui sont touchés par les dégâts toxiques pour le développement du
cerveau en l'absence d'un diagnostic formel. Les produits chimiques industriels
sont en train d'émerger comme des causes probables et les actions de santé
publique deviennent impératives afin de lutter cette pandémie silencieuse.
Reste que cette lutte est difficile en raison du manque de données pour guider
la prévention et l'énorme quantité de preuves nécessaires pour la
réglementation gouvernementale. Très
peu de produits chimiques ont été réglementés en raison de la neurotoxicité
développementale.
Les chercheurs déclarent qu’il s'agit d'un
problème d'envergure internationale qui nécessite une solution internationale.
Ils ont les moyens d’une mise en
place pour tester les produits chimiques industriels pour des effets nocifs sur
le développement du cerveau des enfants, il est maintenant temps de rendre ce
dépistage obligatoire.
Dommages au système nerveux
Plusieurs facteurs expliquent pourquoi les
expositions précoces au cours du développement accentuent la neurotoxicité. Le
système gastro-intestinal du jeune enfant présente un plus haut niveau
d’absorption favorisant l’entrée des contaminants dans l’organisme. L’efficacité
de la barrière hémato-encéphalique est plus faible, facilitant l’accès des
toxines au cerveau. Le système nerveux central en développement, lequel
implique, entre autres processus, la migration cellulaire, la prolifération
cellulaire et la synaptogenèse, est plus vulnérable à la toxicité.
Par exemple, pendant le développement du fœtus,
certains produits chimiques peuvent empêcher que les cellules du cerveau forment
les points de contact entre elles pour communiquer efficacement. D’autres
produits chimiques peuvent avoir un impact direct sur le QI et causer des
problèmes de comportement en modifiant les niveaux d’hormones qui sont vitales
pour le bon développement du système nerveux fœtal. En ce sens, les perturbateurs
endocriniens, qui visent à réglementer le système thyroïdien sont particulièrement
intéressants pour les chercheurs.
L’exposition à des produits chimiques devrait devenir un problème de plus en plus sérieux dans les régions les moins développées car des industries dangereuses s’y installent, pour tirer parti de la mondialisation et échapper aux lois environnementales et sur le travail, plus strictes dans les pays développés. Le danger que ce processus pose aux communautés dans les pays les moins développés inclut non seulement l’augmentation de l’exposition quotidienne, mais aussi des accidents catastrophiques dans des usines de production.
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