Le style de vie numérique des enfants modernes génère des changements dans leur cerveau. Actuellement, le besoin de “contact social“ est si prenant que l’on ne peut pas s’empêcher de lire un e-mail, un message sur Facebook ou de répondre à un message de texte. Si pour les adultes il est difficile d'éviter les distractions, pour les enfants, dont l'esprit est plus susceptible d'être constamment distrait, c’est très inquiétant.
Les enfants, aujourd’hui, ne grandissent pas du
tout dans le même environnement que les parents ont connu dans leur jeunesse.
Jeu, imagination, activité, nature… tous les sens étaient sollicités.
Les enfants d’aujourd’hui ont encore ces options
de jeu idyllique au bout des doigts, mais les écrans de toutes sortes ont fait
leur apparition – téléviseur, ordinateur, téléphone intelligent, tablette – dans
lesquels ils plongent enchantés, souvent même avant de savoir parler. Dès
leur entrée à l'école, ils passeront en moyenne cinq heures quotidiennes avec
eux. Au collège, ils auront tous un portable avec lequel ils enverront, dans
une novlangue de leur cru, en moyenne 83 SMS par jour.
L'influence des écrans sur les premiers temps de
la vie. C'est dans ces années cruciales que se forme le cerveau. Il est alors
particulièrement plastique, fragile, hypersensible à tout ce qu'il voit,
touche, ressent. Les neurones, générés avant la naissance, vont se connecter
durant cette période, puis connaître un regain d'activité au moment de la
puberté. Les réseaux, les autoroutes par lesquelles circule l'information, vont
se former en fonction de l'environnement du sujet.
Lorsque l’enfant entre dans l’adolescence, le
temps excessif passé devant l’écran semble perturber la structure et la
fonction cérébrale. Les dommages se produisent principalement dans le lobe
frontal du cerveau, qui subit des changements considérables. Le développement du
lobe frontal joue un rôle crucial dans tous les secteurs de la vie – du
sentiment de bien-être à la réussite scolaire et du succès professionnel aux
qualités relationnelles –.
On a remarqué chez les adolescents passionnés de
jeux vidéo (derrière leur écran plus de neuf heures par semaine) une
augmentation du volume d'une partie centrale du cerveau, le striatum, liée au
système de récompense. On peut dire que ces jeux vidéo stimulent l'une des
zones les plus primitives du cerveau, vers laquelle convergent les informations
venues du cortex.
Être multitâche altère la mémoire et les capacités du cerveau
Des chercheurs de l'Université de Californie à San
Francisco dans une étude, publiée par la National Academy of Sciences en avril
2011, ont démontré que les personnes qui pratiquent la multitâche utilisent une
partie différente du cerveau quand ils apprennent quelque chose, par rapport
aux non-aptes à la multitâche.
Les ‘multitaskers’
utilisent la mémoire procédurale, qui codifie ce que l'on apprend comme une
routine, tandis que ceux qui se concentrent sur ce qu'ils font sans
distractions utilisent l'hippocampe, une partie du cerveau qui joue un rôle
important dans la formation de nouveaux souvenirs d'événements vécus. Il est
utilisé par exemple, dans une classe de mathématiques pour appliquer des règles
abstraites sur un nouveau problème.
Or les gens concentrés peuvent appliquer une
nouvelle compétence plus largement que ceux qui exercent les multitâches. Le
mode de vie en multitâche serait parfait si les enfants allaient travailler sur
des lignes d'assemblage, mais pour la pensée de haut niveau nécessaire pour des
emplois bien rémunérés, ce serait mieux d’exercer leur hippocampe.
Cela ne signifie pas que les gens devraient s’isoler
pour travailler et cesser d'utiliser des applications telles que les appareils
électroniques et les réseaux. Ce serait comme cesser d'utiliser les voitures de
peur des accidents et de la pollution. Ce qu'il faut faire est rationaliser
l'utilisation de la technologie et acquérir de bonnes pratiques.
La clé est de ne pas aller à l'autre extrême.
Selon les chercheurs il a été montré que la performance est réduite – et le
stress augmente – avec un nombre croissant de tâches. Mais nous savons aussi
qu'un peu de stimulation augmente les performances, mais l'excès les réduit. En substance, il faut
trouver un équilibre.
Une autre étude de l'Université de Stanford menée
en 2009 a relevé que les personnes soumises en permanence au régime multitâche
ont beaucoup plus de mal à passer successivement d'une tâche à l'autre par
rapport à ceux qui ne le sont qu'occasionnellement.
Cette observation souligne l'impact du mode de vie
en multitâche sur la capacité de passer naturellement d'une chose à l'autre en raison
de la réponse instinctive du cerveau aux distractions qui surgissent.
Distractions vis-à-vis desquelles les “non multitâches” sont naturellement
moins sensibles.
L’impact des multitâches sur la structure du cerveau
On appelle “multitâche” le fait d’exécuter
plusieurs tâches mentales qui possèdent une charge de superposition assez
élevée quant aux ressources cognitives qu’elles consomment (comme par exemple
écouter de la musique et avoir une discussion avec quelqu’un).
La société de consommation, productive et
impulsive, assume que quelqu’un qui est “fort en multitâche” est capable de
produire plus lorsqu’il fait beaucoup en même temps, et qu’il est même capable
de brasser plusieurs problèmes parallèlement.
Les spécialistes affirment que la vigilance et
l'efficacité diminuent dès que l'on fait plus d'une tâche à la fois, puisque
chaque alternance de tâche nécessite une pause cérébrale.
Tout indique que nous n’avons pas été sélectionnés
pour être obligés de faire deux activités en même temps et moins encore nous
avons des garanties pour dire que nous allons exécuter les deux tâches de
manière efficace. Nous avons effectivement quelques signes qui montrent que
l’on peut faire l’aller-retour entre deux tâches sans beaucoup de coût
cognitif, mais c’est un peu soutenir l’attention sur une tâche, exécuter l’autre,
retourner à la première.
C’est-à-dire, nous ne sommes pas en train de faire plusieurs choses en même temps, mais
nous passons d’une tâche à l’autre, ce qui est couramment appelé task switching dans les neurosciences.
Ce processus que nous
imaginons en parallèle et multi-rail est en effet un couloir étroit où les
choses passent une par une, et les réorganiser n’est pas gratuit. Alors,
chaque changement ou switch de tâche
entraîne un certain coût cognitif, car au cerveau on ne lui fait pas de
cadeau. Dans la plupart des scénarios possibles, la productivité se réduit en
fonction du nombre de changements ou switches
qui se sont déroulés; en prenant en compte que, lorsque la tâche devient de
plus en plus complexe, la productivité diminue de plus en plus selon l’arrivée
de chaque changement.
Tout cela ne veut pas dire que nous soyons
complètement incapables d’exécuter plusieurs tâches en parallèle, mais que l’on
devrait probablement apprécier un peu moins la capacité de faire beaucoup en
même temps et apprécier un peu plus la capacité à élaborer des schémas d’action
basés sur des priorités, ce qui permet la concentration sur une tâche
spécifique.
Diminution des capacités de mémorisation et de
concentration. Lorsqu'une
personne normale fait deux choses en même temps, les informations ne rejoignent
pas le bon endroit dans le cerveau, le système nerveux fonctionne différemment
et il devient plus difficile de retenir les informations et de les exploiter.
Diminution de la tolérance face à la complexité. Les personnes multitâches ont en effet tendance
à abandonner une tâche ou à la mettre de côté quand elle devient un peu trop
difficile, au lieu de persévérer et réfléchir à la solution pour y arriver.
La technologie bien utilisée joue un rôle clé dans l'amélioration de la capacité intellectuelle
Les progrès récents en neurosciences ont montré
que le cerveau a une grande plasticité: l'être humain peut générer des neurones
tout au long de la vie et augmenter les liens entre eux – même dans la
vieillesse – et peut également améliorer sa concentration (par exemple, par la
méditation, qui va jusqu'à produire des changements physiques positifs dans le
cerveau).
En outre, le cerveau peut être exercé pour réduire
la détérioration intellectuelle qui arrive avec l'âge, pour diminuer le risque
de maladies telles que la maladie d'Alzheimer, ou pour améliorer ses capacités dans
certaines zones, et cette technologie peut y aider.
Après l'invention de l'imprimerie s'est développée
à grande échelle une intelligence réfléchie, linéaire, lente, cumulative. Avec
l'écran, on est dans un nouveau mode : fluide, rapide, fragmenté,
automatique. Ce sont plutôt les régions postérieures du cerveau, les parties
visuelle, sensorielle, l'intelligence élémentaire, qui sont activées. On
sollicite moins, ou trop rapidement, le cortex préfrontal, la partie la plus
noble, que l'on appelle parfois "l'organe de la civilisation", siège
de la synthèse personnelle, du recul, de l'abstraction.
Des études ont montré que certains programmes
éducatifs peuvent accélérer l'apprentissage de la lecture, que des jeux vidéo
améliorent même l'attention sélective et la capacité de contrôle. A condition
de savoir les consommer avec modération.
Par exemple, l'Internet est crucial aujourd'hui
pour aider à créer l'environnement enrichi dont les élèves ont besoin pour augmenter
leur capacité intellectuelle. La recommandation des médecins d'exercer le
cerveau afin qu'il ne vieillisse pas si vite est à l’origine d’une nouvelle
industrie des jeux et des applications en ligne pour garder l'esprit éveillé, tels
que Brain Age pour la console portable Nintendo DS, ou plusieurs applications
disponibles pour l'iPhone et autres Smartphones.
Bien que les scientifiques reconnaissent la nature
addictive des moyens de divertissement et autres gadgets qui nous encombrent la
vie, le monde dans lequel nous évoluons exige de nous un haut niveau de
connectivité et de productivité en mode multitâche.
Il faut laisser notre cerveau se déconnecter afin
d’activer le réseau de neurones appelé “réseau
par défaut”. Ce dernier s’active quand on ne fait rien, quand on n’est
pas concentré sur une tâche (par exemple lorsque l’on conduit sur une route que
l’on connaît bien, par beau temps et sans trafic). Ce réseau joue un rôle fondamental pour la synthèse de notre mémoire.
Les stimulations externes remplacent peu à peu les
stimulations internes. Les enfants ne savent plus jouer. Si un enfant n'apprend
pas à jouer, il est amputé de la capacité d'imaginer, de développer son sens de
l'humour, ce qui le prive d'un moyen puissant d'éviter la dépression.
Pour que l'esprit de l'enfant soit plus concentré,
ait plus de discipline et soit habitué à éviter toutes sortes de distractions, on
doit considérer trois étapes :
* Une tâche à la fois. L'enfant doit faire une
seule tâche à la fois et se concentrer sur cette tâche jusqu'à la fin. S’il utilise
l'ordinateur, alors il doit avoir seulement une fenêtre ouverte pour l'activité
en exécution.
* Rationaliser les réseaux sociaux. Après avoir
terminé ses exercices de mémoire, on lui permettra pendant quelques minutes de
revoir son Facebook ou toute autre site Web.
* Modules thématiques. L’aider à organiser des modules
thématiques d’une durée de 20 minutes, 30 minutes ou 40 minutes, afin qu’il se
concentre sur une seule activité dans ce module.
Il est primordial que le très jeune enfant soit
accompagné dans son exploration numérique par un adulte qui maîtrise lui-même
les “codes” de ce monde, une sorte de code de la route. Cela ne signifie par
forcément que l’adulte doit être en permanence derrière l’enfant, mais
qu’il doit au moins superviser l’expérience.
Dès lors, les écrans ne devraient pas être totalement exclus du développement du petit enfant tant qu’ils tiennent une place mesurée, contrôlée, et qu’ils côtoient d’autres activités : dessiner, courir, jouer au ballon, parler, écouter une histoire… Il faudrait les éduquer le plus tôt possible au numérique, avec parcimonie, afin de développer leur sens critique, aider leur cerveau à s’accommoder de ces mondes nouveaux et leur donner une place, ni démesurée ni reniée, dans leur environnement concret.
Dès lors, les écrans ne devraient pas être totalement exclus du développement du petit enfant tant qu’ils tiennent une place mesurée, contrôlée, et qu’ils côtoient d’autres activités : dessiner, courir, jouer au ballon, parler, écouter une histoire… Il faudrait les éduquer le plus tôt possible au numérique, avec parcimonie, afin de développer leur sens critique, aider leur cerveau à s’accommoder de ces mondes nouveaux et leur donner une place, ni démesurée ni reniée, dans leur environnement concret.
Tous, parents, chercheurs, enseignants, doivent réagir pour continuer de transmettre à leurs enfants, à côté de leur intelligence, rapide, fluide, fragmentée, le mode de pensée plus lent, plus profond.
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